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samedi 24 janvier 2015

ROAD TO PALOMA (2014) DE JASON MOMOA - LA CRITIQUE

ROAD TO PALOMA, c'est l'histoire de Wolf, un indien d'Amérique (un "native", je préfère ce terme) en fuite après s'être fait justice en envoyant ad patres l'assassin (et violeur) de sa mère. Ce beau gosse ténébreux (un peu comme l'auteur de ces lignes) vit de petits boulots, d'air pur et d'eau fraîche jusqu'au jour où, sentant l'étau du FBI se resserrer, il décide de prendre la route accompagné d'un ami. Avec la ferme intention de répandre les cendres de sa génitrice comme il se doit. Là où il se doit.


Si ce n'est son évidente présence physique et son charisme naturel, Jason Momoa n'a, jusqu'à présent, pas eu la carrière qu'il méritait. C'est le moins que l'on puisse dire. En dehors du barbare Khal Drogo de la série Game of Thrones, le reste n'est que du gâchis (le CONAN de Marcus Nispel, un rôle pour lequel il était pourtant taillé sur mesure, reste un grand rendez-vous manqué), sans intérêt particulier. Du coup, le choc ressenti à la vision de ce premier long-métrage humble et fascinant, n'en est que plus terrassant. Avec à peine 600 000 dollars de budget, la maîtrise du cinéaste débutant ne fait aucun doute. ROAD TO PALOMA est une oeuvre très personnelle, portée à bout de bras. Jason Momoa réalise, co-écrit (avec Jonathan HIrschbein et Robert Homer Mollohan, des amis proches), co-produit et tient le premier rôle. Sa propre femme et muse, Lisa Bonnet, y tient aussi l'un des rôles principaux, celui d'un (magnifique) amour de passage. Seule bizarrerie au générique de cette bande farouchement indépendante, la présence de la WWE (oui, la très populaire ligue de catch), plus habituée à débourser son pognon dans des actionners bas du front pour les musculeux John Cena, Steve Austin et autres Triple H. Gageons que, sur ce projet, la firme sous anabolisant s'est senti une âme de mécène éclairé.


C'est sous la forme d'un road movie à tendance biker, qui pourrait donner envie au plus faignant des critiques de le comparer au EASY RIDER de Dennis Hopper, que Jason Momoa déploie ses influences et ses ambitions. Seulement voilà, ROAD TO PALOMA n'est ni un manifeste hippie bobo moderne, ni même un film générationnel. Non. Ici, ce sont les esprits de Michael Mann et de Michael Cimino que l'on sent plâner au-dessus de chaque image, de chaque photogramme. On pense au DERNIER DES MOHICANS (et la présence de Wes Studi n'y est pas pour rien), au CANARDEUR (un peu) et à SUNCHASER (beaucoup). L'âme de l'Amérique originelle, grande, sauvage, libre, belle (magnifique photo capturant de splendides paysages naturels) et de ses premiers habitants hantent littéralement le métrage. Dès les premiers plans, le destin tragique de Wolf, filmé tel un fantôme errant dans le désert, à la frontière du jour et de la nuit, ne fait aucun doute. La caméra se fait flottante, incertaine, capturant de petits moments. Pourtant, malgré l'évidence de la tragédie qui nous pend au nez, le film ne sombre jamais dans la déprime auteurisante ou le nombrilisme arty. Malgré la violence et l'âpreté du monde illustré par cette histoire, point de misérabilisme. Il y a même de la joie, de sublimes envolées solaires disséminées ici ou là. Une empoignade virile qui ferait presque penser à celles qui parsemaient naguère le rigolard DOUX, DUR ET DINGUE avec l'ami Clint. Une rencontre amoureuse sensible, sensuelle, torride. Des retrouvailles en famille chaleureuses.
Sur 90 minutes bien remplies, ROAD TO PALOMA a tout de l'oeuvre d'un cinéaste aguerri et en pleine possession de ses moyens. On appelle ça un chef d'oeuvre, mesdames et messieurs. Tout simplement. Et si la lecture de ce billet vous a donné envie de voir ce film (c'est, du moins, ce que j'espère du fond du coeur), il va falloir quand même vous accrocher. Aux USA et dans une poignée de pays anglophones, ROAD TO PALOMA n'a eu droit qu'à une sortie en salle purement technique. En France, que dalle, nada, vous pouvez toujours rêver. Même pas une sortie en dtv ou en vod à l'horizon. Ne vous reste plus qu'à vous tourner vers un blu-ray US zoné A déjà disponible, un blu-ray anglais zoné B prévu pour avril 2015 ou encore Youtube où le film est souvent visible. Le tout sans le moindre sous-titre français. Va falloir s'impliquer, galérer, fouiner. Mais vous verrez, vos efforts seront largement récompensés.
Verdict : 6/6

Alan Wilson

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