Blog cinéma d'utilité publique

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Obligatoire de 7 à 77 ans

samedi 28 février 2015

LA PROMESSE D'UNE VIE / THE WATER DIVINER (2014) DE RUSSELL CROWE - LA CRITIQUE (EXPRESS)

Bon ben le pitch et le trailer nous auront bien vendu ce qui nous attendais :
C’est LEGENDS OF THE FALL meet GALLIPOLI, en moins définitif c’est certain, mais pour une première réalisation, Crowe affiche des ambitions et un cinéma aux valeurs proche de ce que Costner et Gibson nous avait offert par le passé.


Une fresque guerrière aussi humaniste que tragique, violente et passionnelle. Une aventure épique au souffle romanesque résolument old fashion (avec la forme qui va avec) un sublime classicisme formel presque expressionniste, photo Leanesque a tomber, scope immense, coucher de soleil et cadrage façon carte postal.
Crowe dans un rôle très touchant, subtil, où son charisme s’exprime à chaque tableau, propose même un regard nouveau sur un conflit souvent montré du même point de vue. THE WATER DIVINER est un peu à Gallipoli ce que LETTER FROM IWO-JIMA était à FLAGS OF OUR FATHERS, doublement historique donc. Mais la parenté avec le film de son compatriote Peter Weir ne s’arrête pas juste la, évidemment, car, ici, la narration est équilibrée avec en toile de fond une reconstitution factuelle réaliste, détaillée et précise. Mais vécue par de purs figures de littérature limite mythologique (la place que les lectures de papa Crowe lisait a ces fils dans le récit n’est pas anodine).
Les relations fraternelles et cette amour paternel, valeur familiale de soutien, font évidemment penser aux frères Ludlow de LEGENDS OF THE FALL, la dramaturgie et l'intensité des émotions renvoient au film de Zwick, partageant ainsi une certaine charte visuelle allant dans ce sens. Dommage, justement, que les somptueux flash-back sur leur enfance très Fordienne soit précipités, comme tout le métrage. 1h50, c’est trop étriqué pour une telle fresque.
Il manque pas mal de scènes qu’on aurait cruellement voulu voir, comme le départ des trois frères pour la guerre, plus de clarté et de liens entre les scènes de guerre et la pseudo-révélation finale qui d’ailleurs manque d’intensité. Et même si le script fait preuve de grande finesse pour ce qui est de traiter du choc des cultures et les dilemmes du conflit, c’est un peu plus maladroit pour ce qui est de l’évolution du deuil et du trauma de papa Crowe (très bon point tout de même, on évite la love-story surlignée et on a à la place un truc bien plus mature, même si c’est pas finaud).
L’acteur turque qui tient tête a Russell Crowe est vraiment classe, dans la veine du Saladin du KINGDOM OF HEAVEN de Sir Ridley Scott (on sent que Crowe est allé à bonne école). Bref, voilà un excellent revival d’un style de cinéma quasiment disparu. Espérons que le film gagne en renommée a l’international et pousse Russell à retourner derrière la camera au plus vite !

Pierre Laporte

mercredi 25 février 2015

BIRDMAN / BIRDMAN (OR THE UNEXPECTED VIRTUE OF IGNORANCE) (2014) DE ALEJANDRO GONZALEZ IÑARRITU - LA CRITIQUE (EXPRESS ET TRES ENERVEE !!!)

J'ai détesté BIRDMAN. Profondément. Voilà, c'est dit. Il fallait que ça sorte. Maintenant, je me sens mieux. Tous les éléments semblaient pourtant réunis pour que le film d'Iñarritu me plaise. Michael Keaton, acteur génial mais trop rare, en tête d'affiche, accompagné d'Edward Norton et Emma Stone. Un ton de comédie noire pour aborder le monde du spectacle et la mode des films de super-héros, le tout filmé en un seul plan-séquence "impossible". Virtuosité, anti-conformisme et humour satirique. Le pied quoi. En fait, non. C'est tout le contraire.

Bon, soyons justes. Un film qui reçoit autant de louanges, ce n'est souvent pas pour rien. Et l'on ne peut pas nier que BIRDMAN n'ait pas fait l'objet d'un soin maniaque. Oui, le casting est magnifique. Oui, la photo est très belle. Oui, enfin, le plan séquence (presque) unique, gageure technique du long-métrage, est une réussite indéniable. Mais qu'est-ce qui cloche alors ? C'est pas le contenant, c'est le contenu ma bonne dame ! Et il pue !
Le réalisateur nous a vendu une comédie noire. Désolé, on ne rigole jamais. Ni devant l'érection d'Edward Norton, ni devant la ballade en slip sur Times Square de Michael Keaton, toujours pas devant le mano à mano pathétique de ces deux derniers en coulisses (et en slip toujours, c'est une obsession). On s'attendait à ce qu'un regard intelligent soit porté sur le genre super-héroïque et le besoin de reconnaissance "artistique" de certaines stars dans l'impasse. On a droit à un discours pachydermique sur la névrose des acteurs (tous plus atteints du bulbe que dans l'intégralité de la filmo de Woody Allen, si ce n'est pire) et à des amalgames débiles où se retrouvent, mis dans le même sac à neuneu, les sagas cinématographiques TRANSFORMERS, SPIDER-MAN et X-MEN. Bref, les blockbusters, c'est caca et infantile, et l'Art, le Vrai, c'est adulte, torturé et prétentieux. Et je ne schématise même pas. On s'attendait aussi à ce que BIRDMAN nous raconte une histoire, parce que le cinéma, encore désolé Mr Iñarritu, mais c'est quand même ça. Encore loupé. L'intrigue enfile les clichés les plus insupportables (la star sur le retour, l'actrice qui veut enfin percer, la maitresse hystérique, l'acteur adepte de la Méthode et forcément ingérable, la fille de la star qui a une enfance malheureuse et qui se drogue, etc etc), les personnages éructent leurs pensées tout haut pendant deux heures et de nombreuses pistes narratives sont laissées en plan. Quid de la romance longuement amorcée entre Norton et Stone ? Et ce baiser lesbien torride entre Naomi Watts et Andrea Riseborough ? Et l'avocat joué par Zach Galifianakis, il sert à quoi en fait ? Du grand n'importe quoi qui ne débouche sur ... rien. 
Je vais m'arrêter là. La liste est longue. Il n'aura pas fallu plus de vingt minutes pour que BIRDMAN me grimpe sur les nerfs. Il faut dire que la musique, mélange improbable entre des pièces classiques mal mixées et de la percussion jazz improvisée, n'aide pas non plus. Un calvaire, ce film.

Alan Wilson


mardi 24 février 2015

SI TU TENDS L'OREILLE / MIMI WO SUMASEBA (1995) DE YOSHIFUMI KONDO - LA CRITIQUE (EXPRESS)

Je n'hésite pas à l'affirmer ici, SI TU TENDS L'OREILLE est l'une des chroniques adolescentes les plus émouvantes et ensorcelantes qu'il m'ait jamais été donné de voir. Une sorte d'équivalent animé et nippon d'un BREAKFAST CLUB ou d'un PRETTY IN PINK, partageant avec John Hughes son sens de la caractérisation et un ton très particulier, mélange de drolerie et de douce amertume. 

C'est le premier long-métrage des studios d'animation Ghibli à n'avoir été réalisé ni par Hayao Miyazaki, ni par Isao Takahata, et c'est aussi la première oeuvre de Yoshifumi Kondo, ancien animateur clé. Le personnage principal, Shizuku, est une jeune adolescente de 14/15 ans à la croisée des chemins. Elle partage son temps entre sa famille, sa meilleur amie Yuko et sa passion pour l'écriture et la lecture. Pourtant, elle ignore encore la voie à emprunter et ne se soucie guère de son avenir. Une rencontre avec un garçon, futur luthier, et son grand-père antiquaire, motivée par la curiosité et initiée par un drôle de chat débonnaire, va changer sa vie à jamais et l'aider à y voir clair.
De prime abord, le rythme nonchalant et la succession, presque anecdotique, de scènes de la vie quotidienne croquées avec une justesse et un sens du détail admirable, évoquent le Truffaut des débuts. L'animation, magnifique, travaille dur à créer une impression de fausse simplicité. Les personnages existent et s'imposent dans nos esprits et dans nos coeurs, sans même le besoin d'une intrigue. Mais il y en pourtant bien une, et ses contours se dessinent au fur et à mesure. En fait, elle était là dès le début, inscrite sur des cartes d'emprunts de la bibliothèque locale. Il fallait juste laisser le temps au metteur en scène de la faire émerger. Pour que Shizuku parvienne à mieux se connaître et à s'accomplir enfin, il lui manquait deux choses : un but et l'amour pour lui permettre de le mener à bien. 
SI TU TENDS L'OREILLE pose un regard tendre, espiègle et plein de fantaisie sur les promesses que l'adolescence peut faire naître. Des promesses qui ne se réaliseront qu'à force de travail et de sacrifices. C'est d'ailleurs sur une promesse, encore une, que ce film brillant se clôt. La promesse d'une carrière brillante pour Yoshifumi Kondo. Le destin en décidera autrement puisqu'il décédera le 21 janvier 1998 d'un anévrisme. Pour chaque sourire, il y a une larme.

Alan Wilson        

jeudi 19 février 2015

K-19, LE PIEGE DES PROFONDEURS / K-19 THE WIDOWMAKER (2002) DE KATHRYN BIGELOW - LA CRITIQUE (EXPRESS)

C'est la chronique d'un désastre annoncé. Un peu comme l'APOLLO 13 de Ron Howard, caution historique et décor claustrophobique à l'appui (un sous-marin nucléaire remplace une capsule spatiale) le drame en apnée de Kathryn BIgelow confronte des hommes courageux à toutes les calamités qu'une technologie faillible peut leur faire subir. Mais la comparaison s'arrête là. K-19 LE PIEGE DES PROFONDEURS (quel titre à la mord-moi le noeud !) est une tragédie pesante, une veillée funèbre de deux heures et des poussières, et rarement un hymne triomphant à l'héroïsme et à la débrouillardise.

Dès les premières minutes du film, en installant un climat politique chargé et tendu (la Guerre Froide et sa course à l'armement nucléaire), la réalisatrice filme l'équipage du sous-marin vedette comme des morts en sursis, sacrifiables à la gloire de la Mère Patrie. C'est ce qui différencie ce métrage en particulier de tous les autres films de sous-marins qui l'ont précédé (A LA POURSUITE D'OCTOBRE ROUGE, DAS BOOT ou encore USS ALABAMA, pour citer les plus prestigieux), un genre en soi avec ses codes à base de capitaines/vieux loups de mer, de matelots au regard effrayé et de batailles navales à l'aveugle. Ici, l'ennemi ne lance pas de torpilles mais des radiations. A défaut d'Américains à défier, les soviétiques du K-19 luttent contre un réacteur nucléaire défectueux, crevant à petit feux et vomissant tripes et boyaux, multipliant les réparations de bouts de ficelle pour ne pas que leur précieux sous-marin se transforme en bombe atomique capable de déclencher une Troisième Guerre Mondiale. 
Filmant à hauteur d'hommes un casting très juste dominé par un Harrison Ford impérial, sans esbrouffe, Kathryn BIgelow utilise son budget maousse essentiellement à des fins d'authenticité. Et c'est une réussite sans appel. La sensation de se retrouver enfermé dans un sous-marin massif, implacable cercueil de métal froid, est terrassante. Seul bémol, le score pompier de Klaus Badelt a une fâcheuse tendance à alourdir le propos, surlignant au marqueur gras des scènes qui n'en avaient pas nécessairement besoin. Un artifice hollywoodien dont ce film, humble et traversé par une belle âme slave, aurait pu se passer.

Alan Wilson      

UNDER THE SKIN (2014) DE JONATHAN GLAZER - LA CRITIQUE (EXPRESS)

Des extra-terrestres, le cinéma nous en a offert un nombre conséquent. De toutes les couleurs, de toutes les formes. Des prédateurs, des envahisseurs, des amis, des messies, des mercenaires, des cannibales, des drôles et des moins drôles. Toujours à travers un point de vue strictement humain. Eux vus par nous. Avec UNDER THE SKIN, (très) libre adaptation du roman surréaliste du même nom écrit par Michael Faber, le réalisateur Jonathan Glazer offre un changement de perspective qui a le mérite de l'originalité. Nous vus par eux

Ou plutôt elle. Scarlett Johansson, habitée et mise à nu (au propre comme au figuré) comme rarement, campe une croqueuse d'homme venue d'ailleurs, sillonnant les routes d'Ecosse à la recherche de proies potentielles. Sitôt le mâle pris dans ses filets, elle les "absorbe" (à défaut d'un meilleur terme) et n'en laisse presque rien. Un motard dont on ne saura jamais rien semble l'aider dans sa tâche. En terme d'histoire, c'est à peu près tout. Les dialogues se font rares. La musique, dissonante et un rien casse-burne, cultive l'étrangeté. Tout aussi éloignée des conventions, la narration cumule ellipses, ruptures de tons et non-dits. Inutile de se lancer dans l'analyse de ce que l'on voit à l'écran. La clé est dans le ressenti. Au spectateur de se laisser séduire (ou non) par l'ambiance proposée, alternance de naturalisme, d'abstraction et de formalisme exacerbé. C'est d'ailleurs là la limite du procédé. Puisque UNDER THE SKIN refuse avec obstination de raconter une histoire au sens classique du terme, il demande au spectateur une bonne dose de courage pour s'intéresser et s'impliquer au risque d'en laisser plus d'un sur le carreau. Personnellement, il m'aura fallu deux visionnages (et une bonne dose de café) et la sauce n'a jamais vraiment pris. Tout du long, Je suis resté sur le bas côté, admiratif de la texture cauchemardesque de l'objet ... entre deux baillements de circonstance. Que c'est joli, me dis-je. Avant de sombrer dans les bras de Morphée.

Alan Wilson     
 

mardi 17 février 2015

L'OMBRE ET LA PROIE / THE GHOST AND THE DARKNESS (1996) - LA CRITIQUE



Il était une fois ... le lieutenant-colonel John Henry Patterson. Un irlandais qui s'est fait un nom en Afrique en travaillant pour les anglais avant de devenir, au sortir de la Première Guerre Mondiale, un sionniste convaincu et de mourir en Californie à l'âge de 79 ans. Guerre, aventure, politique et controverse. De tels ingrédients seraient à même de justifier que la vie du bonhomme fasse l'objet d'un film. Le cinéma, néanmoins, ne semble avoir retenu de son existence que l'épisode le plus "exotique", le plus spectaculaire. 
En 1898, les britanniques confièrent à Patterson la mission de mener à bien la construction d'un pont de chemin de fer enjambant la rivière Tsavo au Kenya. Manque de bol, neuf mois durant, deux lions, deux mâles solitaires, attaquèrent et dévorèrent de nombreux ouvriers mais aussi des villageois des environs. On parle de 135 victimes, un chiffre invérifiable mais pas démenti pour autant. Un effroyable carnage. Non sans mal, Patterson réussit finalement à tuer les bêtes, courant décembre 1898. Un livre publié en 1907 et écrit par Patterson lui-même, THE MAN-EATERS OF TSAVO, raconte les évènements en détail. Quant aux deux prédateurs, ils sont visibles depuis 1924 au Chicago Field Museum, empaillés, morts, mais toujours intimidants. L'histoire, il faut bien le reconnaître, est assez incroyable. L'Afrique, sauvage, indomptable, donnant des sueurs froides au colonialisme triomphant. A moins que ce ne soit le contraire. 


Le cinéma ne tarde évidemment pas à s'emparer du récit de l'odyssée meurtrières des deux félins. En 1952 d'abord, avec BWANA DEVIL d'Arch Oboler, avec Robert Stack et en 3D s'il vous plaît. Puis en 1959, avec KILLERS OF KILIMANJARO, réalisé par Richard Thorpe et avec Robert Taylor. Ces deux films ne font que s'inspirer de l'histoire d'origine, brodant autour de personnages fictifs. Il faut donc attendre 1996 et la sortie de THE GHOST AND THE DARKNESS pour qu'un semblant de vérité historique refasse surface. Grâce en soit rendu au scénariste William Goldman (BUTCH CASSIDY & THE SUNDANCE KID, ALL THE PRESIDENT'S MEN, MARATHON MAN ou encore PRINCESS BRIDE, bref un cador de la plume) qui est l'initiateur du projet. Il vend son scénario, qui se veut un croisement entre LAWRENCE OF ARABIA et JAWS, à la Paramount en 1990. Plusieurs acteurs sont envisagés pour le rôle de Patterson, dont Kevin Costner et Tom Cruise. C'est finalement Val KIlmer qui emporte le morceau. A personnage ambigu, acteur ambigu. Réputé difficile, ingérable, Val KIlmer, l'éternel JIm Morrison des DOORS d'Oliver Stone, est pourtant le choix idéal. Dan un rôle assez proche de l'enquêteur tenace du THUNDERHEART de Michael Apted, il fait merveille. Son visage, à la fois poupin et prédateur, arrogant et séduisant, apporte à Patterson une complexité qui l'éloigne des figures héroïque trop lisse. Mais Val KIlmer n'est pas seul en haut de l'affiche. Pour jouer le rôle - totalement fictif - du chasseur Charles Remington (un nom qui annonce la couleur !), c'est Michael Douglas, également producteur, qui est tout (auto) désigné. Et là, mesdames messieurs, il y a comme un hic.
C'est un fait, MIchael Douglas excelle à jouer les anti-héros, ces salopards tellement virils et charismatiques que l'on ne peut s'empêcher de les aimer. Le personnage de Remington, démarquage évident et assumé du Quint jadis campé avec aplomb par Robert Shaw dans JAWS, se voudrait tout aussi mémorable. Ce n'est malheureusement pas le cas. Michael Douglas, sans doute grisé par son égo, en fait trop, beaucoup trop, déséquilibrant dangereusement le récit, forcant le film à ralentir pour se recentrer sur un personnage pourtant secondaire dont le seul attrait - son aura de mystère - se retrouve gâché par des monologues explicatifs sans intérêts (la scène du feu de camp, embarassante à souhait). La grande chasse au lion vire alors pendant un temps au buddy-movie maladroit. Désolé, Michael. C'est pas ton histoire, c'est celle de Val.
Heureusement, il ne s'agit là que d'une portion de métrage. Et quel métrage ! On ne chantera jamais assez les louanges de Stephen Hopkins, artisan talentueux et polyvalent, responsable de ces pépites que sont FREDDY 5, PREDATOR 2, JUDGMENT NIGHT ou encore BLOWN AWAY. Un maestro de la série B haut de gamme. THE GHOST AND THE DARKNESS lui offre l'occasion de verser avec goût dans l'aventure old school. La première demi-heure est à ce titre remarquable. Hopkins choisit très judicieusement d'épouser le point de vue humble et ébahi de Patterson et de nous faire découvrir l'Afrique et son irrésistible pouvoir de fascination en une succession de scènes marquantes, transcendées par le score formidable de Jerry Goldsmith. Et, lorsque surviennent les premières attaques de lion, le cinéaste continue de marquer des points en optant pour un découpage agressif et viscéral, suggestif à souhait, prenant soin de ne pas trop révéler ses prédateurs. Avec pour résultat un maximum d'efficacité. JAWS est, là encore, une influence évidente. Mais jamais écrasante.
En dépit d'un acte central un peu faiblard pour les raisons évoquées un peu plus haut, THE GHOST AND THE DARKNESS est un excellent long-métrage, malheureusement un peu oublié aujourd'hui malgré le fait qu'il soit tout de même lauréat d'un oscar (meilleur montage son - c'est pas Byzance certes mais ça vaut mieux qu'un coup de pied au cul). Si vous arrivez encore à trouver le dvd, donnez-lui sa chance. Vous me remercierez. 

Alan Wilson    

Les vrais lions et mangeurs d'hommes de Tsavo. Et ils n'avaient pas de crinières !


         

lundi 9 février 2015

UNE GRANDE ANNEE / A GOOD YEAR (2006) DE RIDLEY SCOTT - LA CRITIQUE



Outre la satisfaction outrancièrement égoïste de pouvoir aborder en toute liberté des sujets qui vous tiennent à coeur, tenir un blog permet, pour peu que l'on soit lu par au moins 3 personnes (et les parents, ça ne compte pas), de faire entendre un avis contraire, une voix dissonante. Prenez A GOOD YEAR par exemple, la comédie romantique de Sir Ridley Scott avec Russell Crowe et Marion Cotillard. Mal vendu et maltraité par la majorité de la critique, le film s'est royalement planté au box-office et a été jeté aux oubliettes de l'histoire du 7ème Art manu militari. Un sort injuste. Une sentence bête et méchante. Me voici donc, tout fier avec ma belle cape (orange, j'aime bien cette couleur) de super bloggeur, prêt à réhabiliter ce magnifique petit bout de film, un vrai "feel-good" movie dans les règles de l'art.
Si Ridley scott décide de se lancer dans le projet d'une comédie romantique située en Provence, c'est qu'il a deux désirs bien particuliers qu'il tient à combler. D'abord, le cinéaste, comme bon nombre d'anglais, possède une maison en France et, plus précisément, dans le Lubéron, en Provence. Souvent contraint de parcourir le globe pour tourner ses immenses productions, Ridley Scott caresse de plus en plus l'idée de pouvoir tourner un petit film à "huit minutes de chez [lui]". Ensuite, parce qu'il n'est pas du genre à se reposer sur ses lauriers, le réalisateur britannique se verrait bien aux manettes d'une pure comédie, un genre qu'il n'a jamais abordé et qui semble bien loin de son registre habituel, plus sombre et violent que léger et sucré. Mais pour que puisse se concrétiser le projet rêvé, il manque tout de même l'essentiel : une histoire. L'homme providentiel se nomme Peter Mayle, auteur du best-seller A YEAR IN PROVENCE et ... voisin de Ridley Scott. Britannique lui aussi, Peter Mayle est un auteur à la carrière atypique. Stagiaire chez le pétrolier Shell, puis publicitaire, il s'est reconverti en écrivain vers la fin des années 70. Il a d'abord écrit des livres éducatifs sur la sexualité à destination des jeunes (si si !). Puis il a quitté le ciel chargé de l'Angleterre pour le soleil de la Provence. Et là, inspiré par le choc des cultures que sa famille et lui-même ont vécu, il y a trouvé le sujet de ce qui deviendra son grand oeuvre, A YEAR IN PROVENCE donc, une autobiographie pittoresque et innofensive éditée en 1989. C'est ce ton que Ridley Scott souhaite imprimer à son futur film. Mais plutôt que d'écrire un scénario, ce qu'il refuse, Peter Mayle préfère s'atteler à un roman dont il propose de céder les droits à l'avance, laissant Scott et son scénariste Mark Klein l'adapter à leur guise. A GOOD YEAR est né. Le roman est édité en 2004 et le film lui emboîte le pas deux ans plus tard.

Des différences notables entre le roman et son adaptation pour le grand écran sont à signaler. La première et la plus importante concerne Max Skinner, le protagoniste principal. Le personnage incarné au cinéma par Russell Crowe, charismatique, séducteur, arrogant, est un Gordon Gekko british en puissance, un salopard qui malgré ses pirouettes à la limite de la légalité sait qu'il a un avenir brillant dans le monde de la finance. Ce qui est loin d'être le cas de son équivalent sur papier, ruiné et en disgrâce dès le début, sans autre choix que de partir vivre dans le domaine viticole du Lubéron laissé en héritage par feu son oncle Henry. Il y a également l'intrigue, qui diffère sensiblement entre le roman et le film. Dans le roman, Max tombe sous le charme de deux femmes, la notaire Auzet (jouée dans le film par Valéria Bruni-Tedeschi) et Fanny (Marion Cotillard) là où le film se concentre sur la romance avec cette dernière. Dans le roman, le Coin Perdu, la récolte presque clandestine et prestigieuse du domaine est au centre de l'histoire, source de multiples rebondissements, là où le film la simplifie considérablement, s'en servant comme d'une métaphore qui illustre les trésors cachés d'une existence simple et saine. 

Déjouer les attentes et s'épanouir dans le contre-emploi, voilà sans doute la marque des plus grands artistes. A GOOD YEAR n'a ni les ambitions, ni le ton d'un BLADE RUNNER, d'un ALIEN ou d'un GLADIATOR. C'est un film purement récréatif, une bluette joilment naïve, une comédie romantique qui ne cherche même pas à rivaliser avec les classiques du genre. Ce qui ne veut pas dire que Ridley Scott traite son film par dessus la jambe, avec dédain. Non seulement la forme est toujours aussi remarquable et chatoyante, mettant en valeur des paysages naturels rarement exploités au cinéma (ce qui est un crime). Mais c'est surtout le rythme, l'élément essentiel dans une comédie, qui est ici épatant. La première moitié va crescendo, tempo endiablé hérité de la vie trépidante de trader de la city du héros. Le point culminant est atteint lors d'une scène tout bonnement incroyable où Russell Crowe et Didier Bourdon (drôle et toujours juste) s'affrontent sur un cour de tennis, scène d'action improbable mais savoureuse au son du Jump Into The Fire de Harry NIlsson. La seconde moitié se détend progressivement, alors que le héros s'adapte et prend goût à sa nouvelle vie. L'amour vrai prend le pas sur le rire facile et l'ironie. Le propos du film tout entier tient dans ce glissement rythmique. La superficialité doit laisser sa place à l'émotion. Cette leçon de vie, toute bête mais finalement essentielle, le cinéaste nous l'offre sans nous l'enfoncer dans le crâne, avec un sourire complice, un verre de vin à la main,un cigare au coin des lèvres. Comment ne pas voir dans le personnage du vieil oncle Henry interprété par Albert Finney un portrait du cinéaste lui-même. 

Oui, pas de doutes possible, A GOOD YEAR est bien un film de Ridley Scott mais un film lumineux. La déclaration d'amour d'un anglais au bon vivre du sud de la France. Certains n'y verront qu'une carte postale prévisible. Tant pis pour eux. Qu'ils laissent à ceux qui ont un coeur le bénéfice de jouir d'un film sincère.

Alan Wilson    


Le roman de Peter Mayle
  
    

vendredi 6 février 2015

MUSIQUE DE FILM - FLESH AND BLOOD (1985) COMPOSE PAR BASIL POLEDOURIS

Si je vous dis Basil Poledouris et moyen-âge, vous me répondez quoi ? CONAN THE BARBARIAN ? Perdu, vous êtes éliminé. La bonne réponse était FLESH AND BLOOD. Le score de la première collaboration entre le hollandais violent Paul Verhoeven et le compositeur attitré de John Milius est une pure merveille encore trop souvent méconnue des néophytes. Romantique, lyrique, fascinante et portée par le souffle de la grande aventure, la partition de feu Basil Poledouris est tout simplement l'une de ses plus belles et l'une des plus mémorables jamais employée pour illustrer un univers médiéval. Si vous tombez sous le charme, sachez que le label La-la-land Records l'a réédité en cd en 2013 dans une très belle édition.  


HOUSEBOUND (2014) DE GERARD JOHNSTONE - LA CRITIQUE (EXPRESS)




C'est un fait, Peter Jackson a laissé une marque indélébile sur le paysage cinématographique néo-zélandais et plus particulièrement dans le genre fantastique. Hier, c'est le gentiment nul BLACK SHEEP (2006) qui partait à l'assaut des festivals et du cœur des fans en revendiquant son mauvais goût hérité de BAD TASTE, LES FEEBLES et BRAINDEAD, le film de Jonathan KIng allant même jusqu'à confier ses nombreux effets spéciaux de maquillage à Weta Workshop. Aujourd'hui, HOUSEBOUND n'hésite pas à jouer sur le même terrain que THE FRIGHTENERS (FANTÔMES CONTRE FANTÔMES en vf) en tentant la combinaison horreur, fantastique et humour potache, le tout dans une intrigue à tiroirs prenant pour une cadre une maison supposément hantée. Le résultat, honnête et sympathique est néanmoins loin d'être transcendant et affiche des scories qui l'empêche bien souvent d'être à la hauteur de ses (maigres) ambitions.
Écrit et réalisé par un téléaste, HOUSEBOUND est justement incapable de ressembler à autre chose qu'un téléfilm. Cadré sans invention, mal rythmé (un gros ventre mou en milieu de métrage) et ne sachant parfois que faire de sa profusion de personnages (l'agent de probation qui se la joue chasseurs de fantômes pendant cinq minutes avant d'abandonner sans que l'on comprenne pourquoi, le voisin dépeceur d’opossums sous employé et mal écrit, etc), le premier film de Gerard Johnstone évoque un épisode des CONTES DE LA CRYPTE moyen étiré plus que de raison pour atteindre l'heure et demie. Mais bon, pour peu que l'on soit de bonne humeur et que l'on passe outre ces gros défauts, il reste quelques raisons de se réjouir. Le duo mère/fille au cœur du récit est parfois irrésistible, certaines scènes font mouche (l'héroïne qui, dans les toilettes, retient son jet d'urine à chaque bruit suspect dans les murs) et les clins d’œil amusants au SOUS-SOL DE LA PEUR de Wes Craven sont aussi bien pensés qu'amenés. 

Alan Wilson         
  

jeudi 5 février 2015

RUSH (2013) DE RON HOWARD - LA CRITIQUE



James Simon Wallis Hunt est né le 29 août 1947 à Belmont, dans le Surrey, en Angleterre. C'était un buveur, un queutard de première, beau gosse excentrique et indomptable. Et un pilote de Formule 1 talentueux, un vrai trompe-la-mort capable de prouesses au volant, pour peu qu'il s'en donne la peine. Il a même été champion du monde, en 1976. A l'écran, il est incarné par l'australien Chris Hemsworth, papa valeureux du capitaine Kirk dans STAR TREK (2009) de J.J. Abrams et le demi-dieu Thor pour le Marvel Cinematic Universe depuis 2011.
Andreas Nikolaus, dit "Niki", Lauda est né le 22 février 1949 à Vienne, en Autriche. Il est issu d'une famille bourgeoise autrichienne aussi pétée de thunes que respectable. Et c'est sans le moindre soutien, ni moral ni - surtout - financier, de ces derniers qu'il se lance dans une carrière de pilote automobile. Il est calculateur, sérieux, parfaitement maître lui-même, doté d'un physique ingrat que de graves brûlures (conséquentes à un grave accident sur le circuit du Nurbürgring) n'ont pas arrangé et doué pour en mécanique. Il a été champion du monde en 1975, 1977 et 1984. A l'écran, il est incarné par l'acteur allemand Daniel Brühl, célèbre pour ses rôles dans GOODBYE LENIN ! et INGLORIOUS BASTERDS.

Niki Lauda et James Hunt, les vrais ...

Deux sportifs de haut niveau, aux caractères radicalement opposés mais unis par une même discipline, une rivalité médiatique et une année fatidique, 1976. C'est cette histoire qu'a choisi, avec talent, de raconter l'inégal Ron Howard. La formule 1 n'est, heureusement et judicieusement, qu'une toile de fond comme une autre. Sous influence évidente du Michael Mann de HEAT, Ron Howard s'attache à dresser le portrait virtuose et hypnotisant de deux hommes contradictoires, inaptes à la normalité, totalement dévoués à leur mode de vie et portant chacun l'un sur l'autre un regard mêlant défiance et respect. 

... et leur alter-égos cinéma.

Avec BACKDRAFT, APOLLO 13, THE MISSING et CINDERELLA MAN, le foudroyant RUSH est très certainement l'une des péloches les plus mémorables de l'éternel Richie Cunningham, une démonstration de force innatendue sur un sujet à priori réservé aux initiés. Et, avec une reconstitution soignée et détaillée, ainsi qu'une mise en image suffisamment énergique pour retranscrire avec fidélité les sensations de la formule 1, nul doute que les aficionados de course automobile ont dû apprécier. Mais Howard est un grand cinéaste populaire au sens le plus noble du terme et RUSH s'adresse à tous sans se résumer à une banale leçon d'histoire. Le vrai spectacle, c'est surtout celui de deux hommes ne faisant aucun compromis avec leur addiction au risque, qu'elle soit assumée pour Hunt ou pas dans le cas de Lauda. Il faut d'ailleurs voir ce dernier reprendre le volant seulement six semaines après un accident grave, quasi-fatal, souffrant le martyre comme jamais juste pour enfiler son casque, incapable de renoncer à une compétition qui l'a défiguré à vie,  pour savourer tout le paradoxe du bonhomme, publiquement opposé à des prises de risques inutiles. James Hunt a lui aussi droit à de grands moments de cinéma. Le plus réussi intervient juste après son divorce lorsque, dans l'avion du retour, il culbute sauvagement une hôtesse de l'air dans les toilettes, sans jamais quitter du regard son reflet, mélange d'arrogance et de colère, regard de prédateur gonflé à bloc. 
Viril et sexy à la fois, porté par le score électrisant d'un Hans Zimmer, tendu comme le meilleur des thrillers, béni par une mise en scène superbe et un scénario de très très haute volée, RUSH est, en quelque sorte, un idéal de cinéma hollywoodien. This is a man's world !     

Alan Wilson       

En bonus, James Hunt, le vrai en charmante compagnie. NSFW (Not Safe For Work) mais on s'en fout ! Rock n'Roll !


   

lundi 2 février 2015

PROMETHEUS (2012) DE RIDLEY SCOTT - LA CRITIQUE



30 années séparent PROMETHEUS, libre préquelle d'ALIEN, fleuron indiscutable du cinéma de science-fiction et source d'une inspiration toujours vivace, de BLADE RUNNER, l'autre fleuron indiscutable du cinéma de science-fiction et source d'une inspiration encore plus vivace. 30 années bien remplies pour le cinéaste britannique sir Ridley Scott, sa soif de défis et d'éclectisme l'ayant pousser à imprimer sa marque d'esthète hors pair sur des genres aussi variés que l'héroic fantasy, le film noir, le thriller hard boiled, le road-movie féministe, l'épopée historique, le péplum, l'horreur, le film de guerre et même la comédie romantique (avec le tristement méprisé UNE GRANDE ANNEE, mais j'y reviendrais un de ces jours). Pourtant, durant tout ce temps, l'espoir de le voir revenir à la science-fiction, le genre qu'il a révolutionné, son genre de prédilection, demeurait. Le réalisateur lui-même avouait être toujours dans l'attente du projet idéal pour refaire un saut dans le futur. Seules les opportunités manquaient à l'appel.  

2009. La 20th Century Fox, ne sachant pas trop comment relancer la (juteuse) franchise Alien après trois films aux résultats critiques et/ou publics plus ou moins catastrophiques (le Jeunet et les deux crossovers pitoyables avec PREDATOR) propose à Ridley Scott de revenir pour signer un cinquième opus. Refus poli du cinéaste qui estime, à juste titre sans doute, que le xénomorphe d'HR Giger ne fait plus peur. Mais la Fox insista tout de même. C'est alors que Ridley Scott y voit une occasion en or. La mode étant aux reboots, pourquoi ne pas revenir en arrière ? Pourquoi ne pas explorer d'autres pistes ? Le mystérieux space-jockey, gigantesque alien momifié découvert par les membres du Nostromo dans le film original de 1979, lui offre un carrefour. L'image est mythique, indélibile, et charrie son lot de mystères. Qui est cet extra-terrestre siégeant, mort depuis sans doute des centaines (des millers ?) d'années, au-dessus d'une salle titanesque remplie d'oeufs monstrueux ? Etait-il le pilote de l'épave découverte sur LV-426 ? Ridley Scott sait qu'il y a là toute une mythologie à developper et un univers au potentiel suffisant pour alimenter non pas un mais plusieurs films. La Fox est séduite et accepte de lancer le projet. Après une longue période d'écriture, de design et de casting, le tournage débute en mars 2011 et dure 82 jours. Les infos filtrent au compte-goutte. Le film s'appelle PROMETHEUS, il est tourné en 3D native et la construction en dur de décors immenses rassurent les allergiques au tout numérique.  

2012. A quelques semaines seulement de la sortie du monstre, la planéte cinéma retient son souffle. Oui, Ridley Scott est de retour aux manettes d'un grand film de science-fiction, excroissance intrigante de la saga qu'il a jadis initié avec talent, et avec un beau casting de stars qui plus est (Noomi Rapace, Michael Fassbender, Charlize Theron). Les bandes annonces, très réussies, et une campagne internet ingénieuse (à base de vidéos développant l'univers autour du film) sont parvenues à faire monter la pression comme jamais. La critique a aiguisé ses couteaux et s'attend à louer (ou à crucifier) le film.
A l'arrivée, la déception de beaucoup s'expriment violemment, sur le net et ailleurs. Critiques et spectateurs sont divisés. Mais l'essentiel est là, à défaut d'être un raz de marée au box-office, PROMETHEUS est un joli succès et une suite est mise en chantier.
Nous sommes en 2015. On ne sait toujours pas si PROMETHEUS 2 verra ou non le jour mais le recul est suffisant pour juger des véritables qualités et défauts du 20ème long-métrage de Ridley Scott. Parce que l'attente démesurée qu'il a suscité est à l'origine de quelques injustices qu'il est bon de rectifier. 
S'il est un point sur lequel tout le monde est d'accord, c'est que PROMETHEUS est d'une sophistication formelle estomaquante. Comme c'était déjà le cas pour ALIEN et BLADE RUNNER, la direction artistique de PROMETHEUS ne souffre d'aucune concurrence. Photo, décors, effets spéciaux, costumes sont irréprochables, riches de milliers de détails, le résultat d'un soin maniaque devenu la marque de fabrique du cinéma de Ridley Scott. Les amoureux de sf hardcore sont aux anges. Le film est un régal esthétique de chaque instant. Et sa 3D, rarement mentionnée, peut lui permettre de s'inscrire au palmarès des métrages ayant le plu judicieusement fait usage de la technologie du relief.

L'interprétation de l'androïde David par Michael Fassbender est elle aussi l'objet de louanges unanimes. Jamais deux sans trois. Après le Ash de Ian Holm dans ALIEN et le Roy Batty de Rutger Hauer dans BLADE RUNNER, Ridley Scott met sur pied un autre personnage marquant d'homme artificiel. Oui, il est vrai que les meilleurs moments du film sont redevables à David. Un androïde ambigu, animé par des intentions difficiles à cerner. Sa loyauté envers son créateur et les autres membres de l'équipage du vaisseau qui donne au film son titre n'est jamais vraiment évidente. C'est un être artificiel qui cherche sa propre voie, ses propres croyances. Fassbender imprime à son personnage des nuances fascinantes. Face à lui, c'est un peu triste à écrire mais le reste de la distribution peine à exister. La faute à un trop grand nombre de personnages pas inintéressants en soit mais à peine esquissés. Quant à Noomi Rapace, malgré des efforts louables, son personnage de scientifique croyante et courageuse n'a pas l'étoffe d'une Ripley (oui, je fais la comparaison, c'était inévitable, non ?).
Venons en à la pomme de discorde. Le scénario. J'ai souvent lu et entendu qu'il était mauvais. Mal écrit et vide de substance. Ce n'est pas tout à fait vrai. Oui, il souffre de gros défauts mais la base est solide. Une base que l'on doit à Jon Spaihts. Il est l'auteur de l'histoire et des premières versions du scénario. Et des grands thèmes qui fournisse à PROMETHEUS son identité. Les Ingénieurs, une race d'extra-terrestre géant passés maîtres dans la création de formes de vies, sont une magnifique idée. Et le principe d'une expédition à l'autre bout de la galaxie pour que l'Humanité parvienne enfin à comprendre ses origines et rencontrer ses créateurs est ambitieux et excitant. Le problème vient des réécritures opérées par Damon Lindelof à la demande de Ridley Scott. Ne lui jetons pas trop la pierre, le bonhomme a prouvé qu'il était doué pour créer du mystère et pondre des rebondissements à la pelle. Seulement voilà, ce traitement de sérial très télévisuel sied bien mal à une fresque de science-fiction adulte et exigeante. Toute la seconde moitié du film enchaîne les péripéties, les rebondissements inutiles et gratuits (faire de la présence de Weyland dans le vaisseau une surprise n'était pas nécessaire) et les racourcis narratifs hasardeux. Résultat pervers, le récit, déséquilibré par des accélérations trop brusque aurait nécéssité un montage rallongé d'une bonne vingtaine de minutes. Ce qui est un peu frustrant au final. PROMETHEUS raconte une grande et formidable histoire n'en déplaise aux pinailleurs et aux critiques de mauvaise foi, mais il est vrai qu'il la raconte de plus en plus maladroitement au fur et à mesure que les minutes passent.  

Si il serait un peu précipité de qualifier PROMETHEUS de "classique", une évidence s'impose néanmoins. A chaque nouveau visionnage, l'oeuvre se révèle on ne peut plus attachante et complexe. Si un remontage ne serait pas de trop, le film de Ridley Scott offre, en l'état, un spectacle d'un niveau très élevé et donne méchamment envie de découvrir la suite. Sir Ridley Scott, you are still the man !

Alan Wilson      

LE SECRET DE LA PYRAMIDE / YOUNG SHERLOCK HOLMES (1985) DE BARRY LEVINSON - LA CRITIQUE


Bien avant que les prequels, reboots et autres origin stories ne deviennent la mode pour un Hollywood dramatiquement à court d'idées, LE SECRET DE LA PYRAMIDE mené par le trio Spielberg/Columbus/Levinson défricha un terrain encore (relativement) vierge. Le défi était de taille : rendre hommage aux récits et aux personnages mondialement célèbres de Conan Doyle tout en gardant sa propre voix et en racontant une histoire 100% originale. La réussite est éclatante.
Le soin apporté au scénario, aux décors, à la musique, aux effets spéciaux et surtout au casting (sans le moindre acteur connu) constituent une preuve de respect sincère envers les fans des aventures du célèbre détective. Tout en enchaînant les énigmes tortueuses baignant dans une ambiance victorienne du plus bel effet, l'histoire fait la liaison entre un Sherlock Holmes méconnu, passionné et romantique, et le fin limier froid et déshumanisé que l'on connaîtra plus tard. Pour ne pas déroger à la tradition, l'histoire est contée par le docteur Watson, ami et admirateur et le ton oscille entre le souvenir ému d'une jeunesse pleines de promesses et une tristesse inhabituelle pour ce type de grosses productions labellisées "tous publics". 


Deux axes dramatiques majeurs forment la colonne vertébrale de cette histoire de vengeance et de malédictions venues de l'Égypte Antique. Tout d'abord, il y a l'histoire d'amour entre Holmes et Elizabeth (la magnifique Sophie Ward) dont l'issue (forcément) tragique est à fendre le cœur. C'est l'histoire d'un jeune homme qui va apprendre à quel point aimer peut faire mal. Il y a ensuite la relation de maître à élève entre ce même Holmes et le mystérieux Rathe. Résumée à travers quelques regards remplis d'admiration et de crainte et de longs duels d'escrime, cette seconde ligne narrative peut être considéré comme un écho de la première et renvoie le jeune détective en herbe à une tragédie familiale. Au cours d'une des nombreuses scènes d'hallucination qui parcourt le film, il est révélé que Holmes a trahi son propre père à cause de son insatiable curiosité. Rathe prendra alors la place de père de substitution pour Holmes. En retour, ce sera à Rathe de trahir Holmes. La boucle est bouclée et l'impossibilité pathologique pour Sherlock Holmes d'accorder sa confiance à qui que ce soit y trouve là sa source. Sous la caméra de Barry Levinson, le passage à l'âge adulte de Sherlock Holmes se traduit par une perte de sentiments, d'amour, d'amitié. Une victoire à la Pyrrhus en quelque sorte. 


LE SECRET DE LA PYRAMIDE étonne aussi par sa violence et son traitement de l'effroi. Les hallucinations dont les membres de la secte égyptienne vengeresse se servent pour pousser leurs victimes à la mort ne manquent pas d'images marquantes. Statuettes de gargouilles aux griffes acérées, portes manteaux tentaculaires, morts-vivants ricanants ou encore vitraux prenant vie soudainement. On tremble réellement et on en prend plein les mirettes. 


Exemple de blockbuster intelligent qui ne prend pas les enfants pour des neuneus, vrai film fantastique portant le sceau de son producteur Steven Spielberg, LE SECRET DE LA PYRAMIDE est le dernier coup d'éclat de Chris Columbus scénariste avant que celui-ci n'entame une carrière de metteur en scène plutôt discutable. Son travail sur les deux premiers HARRY POTTER ne cesse d'ailleurs de citer ce SECRET DE LA PYRAMIDE sans jamais en atteindre l'élégance. De belles promesses donc, mais restées sans suite. Que ceux qui pensent que  Columbus aurait dû rester scénariste lèvent la main.
 
Alan Wilson

LES AVENTURES DE JACK BURTON DANS LES GRIFFES DU MANDARIN / BIG TROUBLE IN LITTLE CHINA (1986) DE JOHN CARPENTER - LA CRITIQUE


Tout ce qu’il est nécessaire de retenir pour savourer sans retenue le neuvième film de Big John Carpenter peut se résumer ainsi : l'inversion des valeurs. Prendre le cliché du buddy-movie et le retourner. Le concept est simple, connu même, mais génial. Et drôle surtout. Le héros, Jack Burton (Kurt Russell, hilarant à force d’être à côté de ses pompes) se comporte comme l’acolyte, et l’acolyte, Wang Chi (Dennis Dun, énergique et charismatique à souhait), comme le héros. C’est sans doute pourquoi LES AVENTURES DE JACK BURTON … fut un bide sans appel à sa sortie pendant l’été 1986.


A l’origine, il y a un scénario de W.D. Richter (également à l'oeuvre sur L’INVASION DES PROFANATEURS DE SEPULTURE pour Philip Kaufman et réalisateur des AVENTURES DE BUCKAROO BANZAÏ A TRAVERS LA 8ème DIMENSION, de la science-fiction barrée et résolument culte) qui mêle western et comédie fantastique. Jack Burton y est un cowboy vantard, héroïque mais pas bien futé, débarquant à San Francisco et qui, pour retrouver son cheval qui lui a été volé, va se perdre dans Chinatown, ses légendes et ses fantômes. En acceptant de porter cette histoire à l’écran, Carpenter opte très vite de la transposer dans un univers contemporain. Une concession faîte au studio et au public, qui n’a plus vraiment le goût des westerns. Jack Burton le cowboy devient donc Jack Burton le camionneur. Au final, aucune importance. Parce que Jack Burton reste un idiot dépassé par les évènements. Et parce que c’est à l’asiatique que revient le privilège de botter des culs et de secourir sa promise des griffes du maléfique Lo Pan.


Le tournage, qui marque la quatrième collaboration de John Carpenter avec son acteur fétiche Kurt Russell, se déroule sans le moindre problème et sans intervention aucune des exécutifs. Plutôt surprenant lorsque l’on sait que la Twentieth Century Fox y a injecté la coquette somme de 25 millions de dollars et espère tenir là l'un des gros succès de l'été. Seul un nouveau prologue, censé rendre Jack Burton plus « héroïque » (le vieux Egg Shen vante les mérites du camionneur à son avocat), sera tourné à la demande de l’un des producteurs, Barry Diller. Pour le reste, pas de doutes, le métrage est conforme aux intentions du cinéaste. C’est un hommage flamboyant et généreux aux wu xia pan de la Shaw Brothers, aux premiers films de Tsui Hark (ZU ET LES GUERRIERS DE LA MONTAGNE MAGIQUE est cité plus d’une fois) mais aussi à la série japonaise des BABY CART (les trois trombes). Bien avant MATRIX où TIGRE ET DRAGON ne le rende in, John Carpenter met le cinéma asiatique à l’honneur dans un blockbuster américain.
Qu’est-ce qui cloche alors ? Pourquoi diable LES AVENTURES DE JACK BURTON … s’est-il planté en salle ?
Le service marketing n'a eu de cesse de se demander pourquoi Jack Burton ne se conduisait pas plus en héros, pourquoi sa romance avec la magnifique Kim Catrall échoue sans appel (« Vous n’allez pas l’embrasser, Jack ? – un court moment de réflexion – « Non. ») et surtout, surtout, pourquoi on accorde tant d’importance à l’histoire d’un jeune restaurateur chinois amoureux et qui ne recule jamais devant le danger. Ces braves commerciaux se sont tout simplement retrouvés dans une impasse. Comment vendre un film que l’on ne comprend pas à un public dont on est plus ou moins certain qu’il ne le comprendra pas non plus ? Ne cherchez pas. Ils ne prirent même pas la peine de le vendre. Et bien que superbes, les affiches signées Drew Struzan étaient tout autant à côté de la plaque.


Ironie du sort, dix-neuf ans après sa sortie, le film s'est largement rentabilisé grâce à la vidéo et occupe une jolie place dans le cœur des cinéphiles. Laissons donc le mot de la fin à Kurt Russell : « On aime le film ou on le déteste, mais c’est généralement une bonne façon de savoir si ceux qui l’ont vu ont ou pas le sens de l’humour. » Bien dit.
 
Alan Wilson

dimanche 1 février 2015

NE NOUS JUGEZ PAS / SOMOS LO QUE HAY (2010) DE JORGE MICHEL GRAU - LA CRITIQUE (EXPRESS)

Les bêtes de festival, j'ai tendance à m'en méfier. C'est comme ça, je n'y peux rien. La peur de me retrouver devant un film chiant qui ne raconte rien et qui tente d'épicer le tout à coups de saillies gores provocatrices. C'est précisément cette appréhension que j'avais devant le premier film de Jorge Michel Grau, primé à Gerardmer et remarqué à Cannes. J'ai glissé le dvd dans le lecteur sans trop y croire. Une heure et demie plus tard, l'impression est mitigée.

Pour un film d'horreur, le point de départ, anti-spectaculaire et intimiste, est plutôt original. On y découvre une famille de cannibales qui, privée du patriarche, essaie tant bien que mal de perpétuer sa sinistre routine. L'aîné des trois enfants prend sur lui de ramener à la maison une victime destinée à être sacrifiée et dévorée à l'issue d'un rite mystérieux. Dans sa description des tensions familiales et de la violence qui ronge chacun des personnages, le réalisateur réussit à créer le malaise. Sans compatir ni condamner, il observe avec la distance nécessaire, comme on relaterait froidement un fait divers sordide dont les tenants et les aboutissants restent incompréhensibles. Du passé de cette famille, on ne saura jamais rien si ce n'est qu'elle semble se fondre dans la masse de la misère des grandes villes du Mexique. Son avenir semble en revanche tout tracé, un avenir poisseux, sanglant, aux relents d'inceste. Sur un tel sujet, NE NOUS JUGEZ PAS intrigue, passionne même. Dommage que, pour corser le dernier acte, une enquête policière assez ridicule vienne se greffer au récit. Là, on y croit plus une seule seconde et on soupire en levant les yeux au ciel. Ce qui avait commencé comme un brillant récit de la déshumanisation très inspiré par le style dépouillé de David Cronenberg se conclut comme un slasher de seconde zone terriblement ennuyeux. 
C'est évident, Jorge Michel Grau souhaitait livrer une variation sociale, intime et naturaliste du TEXAS CHAINSAW MASSACRE de Tobe Hooper. Mais le résultat, maladroit dans sa conclusion, n'est pas assez abouti pour convaincre pleinement. 

Alan Wilson    

A LA POURSUITE D'OCTOBRE ROUGE / THE HUNT FOR RED OCTOBER (1990) DE JOHN McTIERNAN - LA CRITIQUE

THE HUNT FOR RED OCTOBER est publié en 1984. C'est le premier roman de Tom Clancy, passionné de jeux d'échecs et d'histoire militaire, qui travaillait alors dans une petite compagnie d'assurance à Owings, dans le Maryland. L'histoire suit les efforts désespérés de Jack Ryan, un analyste de la C.I.A., pour permettre le passage à l'Ouest du commandant de sous-marin Marko Ramius, figure éminente de la Marine Soviétique. Ce dernier est en possession de l'Octobre Rouge, un sous-marin nucléaire dont le système de propulsion révolutionnaire lui permet de se mouvoir en silence, au nez et à la barbe des sonars de ses adversaires. Aider Ramius, c'est la chance de pouvoir mettre la main sur l'Octobre Rouge et sa technologie alléchante. Mais les Soviétiques sont prêts à tout pour empêcher que cela n'arrive. L'authenticité, le réalisme et la complexité de l'oeuvre, éditée par le Naval Institute Press (la branche édition du vénérable Institut Naval des Etats-Unis), font mouche auprès du public. Un best-seller est né. Forcément, Hollywood ne perd pas de temps à tenter de s'emparer des droits du roman pour le porter à l'écran. C'est le producteur Mace Neufeld qui remporte le morceau dès 1985. Mais celui qui a produit l'un des premiers succès de Kevin Costner, NO WAY OUT (SENS UNIQUE en vf) réalisé en 1987 par Roger Donaldson, va en chier pour convaincre les grands studios de financer THE HUNT FOR RED OCTOBER, bien plus cérébral et donc risqué qu'un actionner lambda. Finalement, la Paramount fait le grand saut et donne son feu vert à Mace Neufeld. 

C'est John McTiernan qui se retrouve derrière la caméra, avec les pleins pouvoirs, les succès de PREDATOR et DIE HARD aidant. Amoureux du bouquin, le cinéaste force le scénariste Larry Ferguson à jeter son premier jet pour rendre un travail plus fidèle à sa source et invite John Milius (oui, John Milius, le réalisateur de CONAN LE BARBARE et de L'AUBE ROUGE) à venir ajouter son grain de sel, ce dernier parsemant le script de répliques de son cru. Rayon casting, Kevin Costner est envisagé pour endosser l'uniforme de Jack Ryan mais son emploi du temps trop surchargé (un certain DANCES WITH WOLVES semble l'accaparer) l'oblige à décliner l'offre. C'est le (presque) débutant Alec Baldwin qui en profite. Un choix magnifique. S'il est un héros à plus d'un titre, Jack Ryan n'est pas un homme d'action au sens classique du terme. Son arme, c'est son intelligence. C'est donc un Ryan à la fois cultivé, volontaire, espiègle, courageux, parfois un peu gauche mais toujours séduisant et triomphant que campe Alec Baldwin, cinégénique en diable. A ce petit jeu, ni Harrison Ford, ni Ben Affleck, ni Chris Pine, ses successeurs dans le rôle, ne parviendront à l'égaler. Ironie du sort, la denière (en fait la première, reboot oblige, argh) aventure de Jack Ryan en date, réalisée par un Kenneth Branagh fantôme et sortie sur nos écrans en 2014 s'offrira les services de Kevin Costner dans un rôle de mentor. Pour le rôle de Marko Ramius, c'est d'abord Klaus Maria Brandauer qui est engagé. Mais il doit abandonner à deux semaines de tournage en raison d'un autre engagement. Enfer, damnation et solution. Sean Connery prend la relève et apporte son aura de légende vivante à un rôle qui ne demandait que ça. Un jeune premier qui promet et un vieux loup de mer en tête d'affiche. McT a du charisme en or massif pour remplir son cinemascope toujours si élégamment et précisément cadré. Et on oubliera pas non plus de mentionner le reste du casting. Scott Glenn, Sam Neill, James Earl Jones, Richard Jordan, Jeffrey Jones, Tim Curry, Stellan Skarsgard, Courtney Vance, Joss Ackland. Excusez du peu ! C'est l'une des plus grandes qualités de cet adaptation cinématographique. La distribution dégage, jusque dans ces plus petits rôles, un magnétisme, une authenticité et une crédibilité qui sautent aux yeux.

Dans sa mise en scène, John McTiernan parvient avec THE HUNT FOR RED OCTOBER à se surpasser. Parfaitement servies par la photo superbe et ingénieuse de Jan de Bont, la fluidité, l'élégance et la parfaite maîtrise de son cadre et de ses mouvements de caméra donnent corps à une série de joutes verbales passionnantes. McTiernan "filme" littéralement les dialogues. Un véritable ballet cinématographique rythmé par les choeurs de l'armée rouge brillamment intégré par Basil Poledouris (ami et compositeur de - tiens, tiens - John Milius) à sa composition. 
Par la forme, c'est à une leçon de politique que se livre le réalisateur de DIE HARD. "Je suis un menteur et un tricheur. Je souris aux enfants pendant que je leur vole leur sucettes" nous dit le personnage de ministre de la défense interprété par Richard Jordan. McTiernan ne fait rien d'autre. Il nous fait passer une myriade d'informations, de nuances, de tactiques par un simple tour de magie formelle. La caméra séduit le regard, l'ensorcelle même pour mieux faire avaler au cerveau des enjeux qui, autrement, aurait nécessité des heures et des heures d'explication. De la vulgarisation de haut vol en somme. Masterpiece, Sir !   

Alan Wilson