Blog cinéma d'utilité publique

Blog cinéma d'utilité publique
Obligatoire de 7 à 77 ans

lundi 20 juillet 2015

TERMINATOR GENISYS (2015)

Réalisateur : Alan Taylor.
Scénario : Laeta Kalogridis et Patrick Lussier, d'après des personnages créés par James Cameron et Gale Ann Hurd.
Directeur de la photographie : Kramer Morgenthau.
Musique : Lorne Balfe.
Avec Emilia Clarke, Jai Courtney, Jason Clarke, Arnold Schwarzenegger, J.K. Simmons, ...
Etats-Unis - Couleur - 126 minutes.


Arnold Schwarzenegger. Trop vieux pour ces conneries ?


La cinquième roue du carrosse.

Comment diable en sommes-nous arrivés là ? Tout avait pourtant fort bien commencé. Deux classiques indiscutables de la science-fiction hardcore (signés James Cameron, who else ?) suivis de deux séquelles inutiles mais honorables (avec une nette préférence de l'auteur de ces lignes pour l'apocalyptique TERMINATOR SALVATION de McG), sans oublier une série TV plutôt réussie et courte d'à peine deux saisons. Jusqu'à présent, les aventures temporelles et pétaradantes du T-800, de Sarah Connor et de son fils John,de Kyle Reese et consorts, c'était quand même de la balle, comme disent les d'jeuns. Mais toutes les bonnes choses ont une fin et le nanar d'Alan Taylor est là pour nous le rappeler. 
Lancé à coup de bandes-annonces inquétantes de nullité et vendu par James Cameron himself comme le "vrai TERMINATOR 3 (...) une renaissance" dans une interview promo aussi crédible qu'un discours politique une veille d'élection, TERMINATOR GENISYS s'annonçait comme un sacré désastre, le viol sans vaseline d'une franchise bien aimée. Inutile de vous préciser donc que j'avais prévu les mouchoirs. Plusieurs paquets de mouchoirs même (plus que pour le visionnage d'un porno, c'est dire).
Après visionnage de la "chose", je n'ai aucune larme à sécher et je me dis que ça aurait pu être pire. Attention, c'est pas reluisant non plus. Ne rêvons pas. Si TERMINATOR GENISYS évite le zéro pointé de justesse, c'est essentiellement grâce à un univers qui, même traité avec une bêtise crasse, parvient à captiver durant une première demi-heure énergique. C'est moche mais, avec son avalanche de péripéties qui revisitent les premiers films, ça a le mérite d'être distrayant. Et il y a Arnold. Arnold qui semble véritablement être le seul à y croire et à vouloir en donner aux fans pour leur argent. Contre toute attente, il est parvenu à rendre son personnage de cyborg vieillissant (mais pas obsolète) et bienveillant crédible. Sur le papier, c'était casse-gueule et ridicule (un terminator aux cheveux blancs affectueusement surnommé Papy, euh, vraiment ?). Mais Arnie s'en tire vraiment bien. Un pur miracle. 
Le reste est tout simplement honteux. Le scénario, mal écrit et mal ficelé, ne tient jamais debout. La mise en scène d'Alan Taylor, paresseuse et hideuse, vient confirmer après un THOR - THE DARK WORLD déjà de sinistre mémoire que le bonhomme ferait mieux de retourner au petit écran le plus vite possible. Quant à Jai Courtney, succédant à Michael Biehn et Anton Yelchin dans le rôle de Kyle Reese, il est tellement mauvais qu'on accepterait volontiers une lobotomie histoire d'oublier son existence. 
Si vous ne savez pas comment occuper un samedi soir pluvieux, que vous êtes déjà perdu dans les brumes reposante d'un nuage de cannabis de qualité premium, que vous avez un bon pack de bières bien fraîches et que le livreur de pizza vient de sonner à votre porte avec une napolitaine supplément fromage, alors TERMINATOR GENYSIS devrait faire l'affaire. En fait, non, commandez le dvd de BLUES BROTHERS. C'est bien les BLUES BROTHERS. Revoyez plutôt ça.

Alan Wilson.      

dimanche 12 juillet 2015

MAN OF STEEL (2013)

Réalisateur : Zack Snyder.
Scénario : David S. Goyer, d'après une histoire de David S. Goyer et Christopher Nolan.
Directeur de la photographie : Amir Mokri.
Musique : Hans Zimmer.
Avec Henry Cavill, Diane Lane, Amy Adams, Kevin Costner, Russell Crowe, Michael Shannon, Laurence Fishburne, Christopher Meloni, ...
Etats-Unis - Couleur - 143 minutes.




(Demi) Dieu ?

Et si la nouvelle bande-annonce, dévoilée il y a peu au Comic Con de San Diego, de BATMAN V SUPERMAN - DAWN OF JUSTICE, rencontre pétaradante et tant attendue entre le croisé à la cape de Gotham City et le dernier fils de Krypton, nous offrait l'occasion rêvée de revenir un instant sur MAN OF STEEL, le précédent effort de Zack Snyder ? Histoire de s'offrir un nouvel avis, à tête reposée, sur un film qui a conquis le box-office mais qui a aussi beaucoup divisé, tant la critique que le public.
Engager David S. Goyer et Christopher Nolan aux côtés de Zack Snyder était pour Warner et DC Comics la garantie de conserver le ton sombre et réaliste d'une trilogie Batman qui aura rapporté des milliards de dollars. Une caution bien plus rassurante que les derniers films (WATCHMEN et SUCKER PUNCH) - boudés par le public - de Zack Snyder, supposément réduit à une tâche d’exécutant. Ironie du sort, les plus gros défauts de ce MAN OF STEEL sont largement imputables aux duettistes de THE DARK KNIGHT tandis que ses (immenses) qualités sont le témoin de l'incroyable vitalité d'un Zack Snyder en pleine possession de ses moyens. Comme le classique de Richard Donner de 1978, MAN OF STEEL s'ouvre sur les derniers jours de Krypton, une planète opulente mais condamnée où les idéologies de Jor-El et du général Zod s'affrontent. Ce premier quart d'heure offre un spectacle d'une ampleur titanesque où science-fiction et fantasy se mêlent avec la même virtuosité que dans AVATAR. Quinze minutes seulement et Snyder prouve qu'il est l'égal d'un James Cameron. C'est après que les choses se gâtent (un peu). Alors que la capsule du nourisson Kal-El, rescapé de l'apocalypse de Krypton est sur le point de s'écraser dans les champs de Smallville, à quelques encablures de la ferme Kent, une coupe brutale nous projette une bonne trentaine d'années plus tard alors que Kal-El/Clark Kent parcourt le monde, broyant du noir et sauvant des gens dans un total anonymat. Maladroite, l'ellipse amorce une narration totalement inadaptée, opérant de nombreux va et vient entre le présent et la jeunesse du super-héros jusqu'à la moitié du deuxième acte. Sans trop se fouler, Goyer applique à MAN OF STEEL la méthode employée dans BATMAN BEGINS. Mais la greffe ne prend pas. Si une narration éclatée convient parfaitement à l'esprit tourmentée d'un Bruce Wayne hésitant sans arrête entre vengeance et justice, il n'en va pas forcément de même pour Superman. Il est donc difficile, dans un premier temps, de s'attacher à un héros dont le dilemme principal (s'intégrer dans la société humaine, pas à pas) perd toute cohésion. Surtout lorsque les flash-backs en question, montés à toute vitesse, ne s'offre aucune respiration et en vienne à sacrifier quelque peu le personnage essentiel de Jonathan Kent, père adoptif de Kal-El et mentor. Si l'interprétation impeccable de Kevin Costner sauve les meubles, produisant in extremis l'émotion nécessaire, les regrets sont tout de même de mise. Narration et montage. Deux gros points noirs qu'un cut alternatif, plus aéré, moins elliptique et linéaire suffirait pourtant à gommer. 
Mais, si l'on fait fi de ces défauts et que l'on s'adonne à un ou deux visionnages supplémentaires, alors le métrage de Snyder dévoile de véritables trésors de cinéma. Abandonnant les ralentis hypnotiques et iconiques de ses précédents films, Snyder filme le plus souvent l'action caméra à l'épaule avec une maîtrise du procédé qui n'a rien à envier à un William Friedkin ou un John McTiernan. Le tout avec la même science du cadre démontrée dans 300 ou WATCHMEN. Lisibles et ultra-dynamiques, les nombreux morceaux de bravoure de MAN OF STEEL sollicitent tous les sens du spectateur, à des années lumières des cinématiques désincarnées (et désormais lassantes) des productions Marvel. Bien que très critiqué pour ses destructions massives à répétition, le climax se montre exemplaire à tous les niveaux en combinant action et émotion, jusqu'à culminer dans un meurtre de sang-froid déchirant et culotté dans le contexte d'une telle production mais aussi totalement justifié (comment faire ressentir le profond dégoût de ce super-héros pour le meurtre sans qu'il s'y confronte lui-même ?). 
En plus de briller dans sa mise en image, Snyder continue également de démontrer ses aptitudes de directeur d'acteurs en obtenant de son casting des prestations impeccables. Si Henry Cavill et Amy Adams redonnent un nouveau souffle au couple Superman/Lois Lane malgré un montage qui, encore une fois, étouffe un peu leurs scènes communes, ce sont essentiellement Michael Shannon et Christopher Meloni qui se taillent la part du lion et marquent les esprits. Le premier balaie totalement le Zod mégalo et condescendant de Terence Stamp pour offrir une partition plus riche, incandescente, à vif (son "I WILL FIND HIM" vindicatif répété chaque fois plus fort au visage de la mère de Superman est mémorable). Le second, dans un rôle de militaire teigneux à priori générique, révèle un charisme en acier trempé encore trop peu exploité sur grand écran. Sa querelle avec la kryptonienne Faora est l'une des sous-intrigues les plus réussies de ce MAN OF STEEL.
MAN OF STEEL est bien plus qu'un film de super-héros lambda, un blockbuster de plus. Si Goyer et Nolan apparaissent comme des boulets aux pieds de Zack Snyder, ce dernier fait bien plus que de servir la soupe à un genre super-héroïque bientôt à saturation. Il fait son cinéma à lui et n'hésite pas à bousculer les codes du genre en risquant de se mettre les geeks et autres gardiens du temple à dos. C'est SON Superman et il nous en offre SA vision, pas (totalement) le produit d'une réunion marketing. L'effort est plus qu'à saluer. Il est à chérir.

Alan Wilson.

HOMMAGE A JAMES HORNER (1953/2015)



Non. James Horner, ce n'était pas seulement la bande originale de TITANIC avec ses trente millions d'exemplaires vendus à travers le monde et le hit (que je le veuille ou non) My Heart Will Go On chanté par Céline Dion. Le réduire à ce succès serait une grave erreur. Il y a une œuvre, avant et après TITANIC. Et elle est grandiose, tout simplement.  

Pour lui rendre hommage, j'ai décidé de revenir sur la carrière du compositeur, tragiquement disparu le 22 juin dernier dans un accident d'avion, au travers de dix morceaux qui me tiennent tout particulièrement à cœur. Pourquoi seulement dix et pas quinze, vingt ou plus ? Je l'ignore mais je suppose que si je venais à dépasser cette barrière totalement arbitraire, l'émotion m'empêcherais de m'arrêter et cet hommage n'en finirais plus. Je suppose qu'il faut parfois savoir lâcher prise et ne garder que ce que l'on considère être l'essentiel. Je suppose ...

Voilà. Je laisse les mots de côté et je vous laisse savourer la musique. 




 1. WOLFEN (1981) de Michael Wadleigh - Suite



   
2. STAR TREK III - THE SEARCH FOR SPOCK (1984) - Stealing the Enterprise



      
3. COCOON (1985) de Ron Howard - The Ascension





4. ALIENS (1986) de James Cameron - Bishop's Countdown




5. WILLOW (1988) de Ron Howard - Suite. 




6. GLORY (1989) d'Edward Zwyck - Charging Fort Wagner.




7. THUNDERHEART (1992) de Michael Apted - This land is not for sale/End Credits.



 8. SNEAKERS (1992) de Phil Alden Robinson - Too Many Secrets.




9. BRAVEHEART (1995) de Mel Gibson - The Battle of Stirling.




10. THE PERFECT STORM (2000) de Wolfgang Petersen - Coming Home From The Sea.



Alan Wilson

(je tiens à nouveau à féliciter Cédric Delelée pour son hommage au compositeur dans les pages du Mad Movies n°287 de juillet/Août 2015. Je n'aurais pas su trouver de meilleurs mots que lui. Pour rendre compte de mon émotion, je ne pouvais que laisser s'exprimer les notes du maestro)  

 

samedi 27 juin 2015

HOMMAGE A CHRISTOPHER LEE (1922-2015)



Je n'ai pas découvert le talent de Christopher Lee avec les classiques de la Hammer, ni même avec sa prestation en Scaramanga, le méchant en titre de L'HOMME AU PISTOLET D'OR. Non, la première fois que son imposante silhouette m'est apparue, c'est dans un rôle mineur mais néanmoins marquant. Dans le dyptique LES ANNEES LUMIERE/LES ANNEES TERRIBLES de la Révolution Française, une fresque réalisée par Robert Enrico et Richard T. Heffron, l'immense acteur interprète Charles-Henri Sanson, bourreau glacant se tenant raide comme un piquet à côté d'une guillotine dégoulinante de sang. Son temps de présence à l'écran ne doit guère dépasser les dix minutes et il n'a presque aucun dialogue. Mais sa présence a durablement marqué l'enfant que j'étais alors. J'avais la certitude absolue d'avoir contemplé la Mort en personne. Je n'en ai retiré aucun cauchemar, mais je n'ai pas pu effacer cette icône morbide de mon esprit non plus.
Par la suite, cinéphile désordonné que je suis, j'ai abordé la carrière de ce (très) grand monsieur dans le chaos le plus total. Une MALEDICTION DES PHARAONS (1959) par là, un CHIEN DES BASKERVILLE (1958) par ci, LE CORPS ET LE FOUET (1963), mon premier Bava (ça ne s'oublie pas !) et, point d'orgue de ces années de découverte, le génial THE WICKER MAN (1973) de Robin Hardy ! Et dans son director's cut, s'il-vous-plaît ! Lee y interprète Lord Summerisle, grand ordonnateur de rites païens sur une petite île du nord de l'Ecosse.
Puis vinrent Tim Burton, Peter Jackson et George Lucas. Motivés par la même nostalgie, les cinéastes remettent alors la légende en avant. Si Burton se contente de lui offrir des seconds rôles en forme de caméos (il est un juge menacant dans SLEEPY HOLLOW ou encore le père de Willy Wonka dans CHARLIE ET LA CHOCOLATERIE), Lucas et Jackson lui offre chacun un rôle bien plus substantiel, respectivement dans les sagas STAR WARS et LE SEIGNEUR DES ANNEAUX. Si le Comte Doolu échange (élégamment) les canines du saigneur de Transylvannie contre un sabre laser, Saroumane le Blanc est un magnifique hommage au sorcier corrompu créé par J.R.R. Tolkien (que Lee connaissait personnellement) où l'acteur joue de sa voix grave et articulée comme jamais.
Je vais m'arrêter là et ne pas transformer ce billet en page wikipédia. Je vais rester dans le souvenir.
Salut l'Artiste.

Alan Wilson

JAMES BOND CONTRE LE DR NO (1962)

Titre original : Dr No.
Réalisateur : Terence Young.
Scénario : Richard Maibaum, Johanna Harwood, Berkely Mather, d'après le roman de Ian Fleming.
Directeur de la photographie : Ted Moore.
Musique : Monty Norman.
Avec Sean Connery, Ursula Andress, Joseph Wiseman, Jack Lord, Bernard Lee, ...
Royaume-Uni - Couleurs - 109 minutes.



Dans le jardin du bien et du mâle.

Alors que les héros les plus populaires du 7ème Art ne cessent de renaître, témoignant de leur vitalité (financière autant qu'artistique) au travers d'innombrables séquelles, préquelles, reboots, remakes et autres, il est toujours sain d'effectuer un retour en arrière, de remonter à la source. C'est d'autant plus vrai dans le cas de James Bond 007, l'éternel espion au service secret de Sa Majesté. Loin de la sinistrose actuel, ce premier épisode humble, solaire et dynamique est un véritable bain de jouvence ainsi qu'une belle démonstration en subversion discrète.
Sous des atours de série B élégante et dynamique, ce DR NO ne s'embarasse guère de la chevalerie des héros d'antan. James Bond n'est pas un gentleman. C'est une brute. Sophistiquée, certes, mais une brute tout de même. Et un assassin de sang froid, prêt à mener sa mission sans se soucier de la morale ou de la galanterie. Si, pour éviter de s'alliéner le grand public, le personnage est nettement adouci dans son passage du livre à l'écran, il n'en représente pas moins une fracture brutale avec les héros propres sur eux d'alors. Il est ni un anti-héros de polar noir, ni un boyscout sans peur et sans reproches. Il boit et maltraite les femmes et ça ne lui pose aucun problème de conscience. Avec un personnage de la sorte, le casting est essentiel. Et Sean Connery fut la trouvaille idéale. Une pillule poilue mais incroyablement facile à avaler. L'acteur écossais, pas encore star, fait preuve d'un charisme, d'une autorité et d'une aisance indiscutable. Aussi crédible en tueur redoutable, qu'en séducteur irrésistible ou qu'en fonctionnaire zélé de Sa Majesté. Une sacré performance.
La mise en scène de Terence Young est tout aussi admirable. Avec une apparente simplicité, et la complicité de son monteur Peter R. Hunt (futur réalisateur du mal aimé mais pourtant génial AU SERVICE SECRET DE SA MAJESTE, seule aventure bondienne de George Lazenby), Young impose un style proche de la bande-dessinée filmée. Les cadrages iconiques et soignés se succèdent à une belle allure et les scènes d'actions sont soudaines et sèches. Les couleurs vives des costumes, des décors et des éclairages font baigner le film dans un sentiment de surréalisme pop agréable et, surtout, jamais ostentatoire. Une belle leçon d'équilibrisme et de formalisme.
Encore éloignée des gros budgets à venir, ce premier épisode évite d'en faire les caisses misant beaucoup sur une intrigue simple mais efficace. Terence Young ne charge pas la mule et fonce vers la ligne d'arrivée sans négliger de mettre en valeur son casting et ses décors naturels (la Jamaïque).  Revoir JAMES BOND CONTRE DR NO aujourd'hui, c'est un peu assister à la naissance du blockbuster moderne. Sans le cynisme et les caches-misères à cent million de dollars.

Alan Wilson.   

jeudi 11 juin 2015

RESIDENT EVIL (2002) / RESIDENT EVIL - APOCALYPSE (2004) / RESIDENT EVIL - EXTINCTION (2007) / RESIDENT EVIL - AFTERLIFE (2010) / RESIDENT EVIL - RETRIBUTION (2012)

Réalisateurs : Paul W.S. Anderson, Alexander Witt, Russell Mulcahy.
Scénarios : Paul W.S. Anderson, d'après RESIDENT EVIL, un jeu créé par Shinji Mikami et développé par Capcom.
Directeurs de la photographie : David Johnson, Derek Rodgers, Christian Sebaldt, Glen McPherson.
Musique : Marco Beltrami, Marilyn Manson, Jeff Danna, Charlie Clouser, Tomandandy.
Avec Milla Jovovich, Michelle Rodriguez, Oded Fehr, Ali Larter, Sienna Guillory, ...

Canada/Royaume-Uni/Allemagne/France/Etats-Unis - Couleurs -  100 minutes/94 minutes/94 minutes/97 minutes/96 minutes.  



Série Z.

Amusant tout de même de voir à quel point une franchise cinématographique peut se développer en dépit du bon sens, niant avec un aplomb consternant quasiment toutes les qualités du matériau dont il est issu. AInsi, RESIDENT EVIL, le jeu, et RESIDENT EVIL, les films sont impossibles à comparer. Leurs seuls points communs ? Des noms, des bouts d'histoire, quelques monstres. Et ça s'arrête là. De toute façon, ça n'est pas plus mal. On ne peut pas juger un film comme on juge un jeu vidéo.  
A la tête des cinq (et bientôt six) RESIDENT EVIL, un trio de créatifs. Le producteur Samuel Hadida, le scénariste (!) et réalisateur Paul W.S. Anderson et sa femme, l'actrice (!!) Milla Jovovich. Si le premier se contente de signer et d'encaisser les chèques (incroyable mais vrai, la franchise engrange des millions), les deux autres chapeautent avec une belle incompétence. Artisan consciencieux et généreux mais parasité par des réflexes de fanboys, Paul W.S. Anderson possède une filmographie qui oscille entre agréables distractions (SOLDIER, MORTAL KOMBAT) et nanars de compétition (les RESIDENT EVIL donc, mais aussi le premier ALIEN VS PREDATOR et ses TROIS MOUSQUETAIRES) avec, au milieu, une incartade réjouissante, le jouissivement déviant EVENT HORIZON. Quant à sa muse, Milla Jovovich, anciennement Leloo à la tignasse orangée qui pique les yeux et Jeanne d'Arc illuminée chez notre bon gros nounours national Luc Besson, elle explore l'étendue de son absence de talent en incarnant Alice, héroïne horripilante à la psycholoie alambiquée embarquée de films en films dans un monde pas vraiment merveilleux. 
Un temps promis à George A. Romero, le pape des morts-vivants, le premier volet de la saga RESIDENT EVIL échoue finalement entre les mains d'Anderson qui se charge éalement d'en écrire le scénario. Composant avec un budget plutôt maigre de 35 millions de dollars et l'obligation de livrer un produit tous publics (une hérésie pour un survival horror à base de mutants cannibales), le cinéaste parvient à faire illusion pendant environ quinze minutes. Juste le temps de décimer avec une certaine cruauté tout le personnel d'un gigantesque laboratoire souterrain contrôlé par une intelligence artificielle aux pulsions homicides et d'illustrer le réveil de son héroïne, nue et amnésique, au son du score angoissant de Marco Beltrami et Marilyn Manson. Puis, patatras, voilà que déboule le commando le plus débile et incompétent de l'histoire et c'est parti pour une bonne heure de film de couloir cheap, mal joué et laborieux dans son déroulement. Le tout servi par une interprétation unanimement calamiteuse. Reste le prologue, un sursaut inattendu annonçant une séquelle apocalyptique au détour d'un travelling arrière vertigineux révélant une cité en flammes, ravagées par des hordes de zombies. Maigre consolation.
Occupé à (mal) torcher ALIEN VS PREDATOR, Paul W.S. Anderson ne rempile pas à la réalisation de RESIDENT EVIL - APOCALYPSE dont il se contente d'écrire le scénario. A la barre, le débutant Alexander Witt, ancien réalisateur de seconde équipe ayant appris le métier dans l'ombre de Jan de Bont. Un cv de technicien bien fourni qui a convaincu la production de le laisser voler de ses propres ailes. Mal leur en a pris. Avec un budget sensiblement supérieur au premier volet, APOCALYPSE se paie des allures de série Z ridicule. Voire franchement drôle dans son incapacité à offrir ne serait-ce qu'une seule séquence correctement emballée. Et que dire du grand méchant du film, le "terrible" Nemesis. Croisement caoutchouteux et neuneu entre Casimir et un cénobite d'HELLRAISER sous stéroïdes, ses apparitions régulières, entre beuglements gutturaux et pyrotechnie destinée à noyer le poisson, provoquent une franche hilarité. Et comme si ça ne suffisait pas, le tout se termine par un épilogue singulièrement tartignole durant lequel notre Alice se découvre des super pouvoirs. La logique aurait voulu que l'on arrête là les frais. Mais non, les billets verts tombant encore plus nombreux, le couvert est remis pour un troisième volet.
Sous la houlette du vétéran Russell Mulcahy (RAZORBACK et HIGHLANDER, et ... oublions gentiment le reste), la qualité remonte d'un cran. Du Z on passe au B, et du film de zombie on dérive vers le post-apo à la sauce Mad Max dans le désert du Nevada. Le rythme est soutenu, la mise en scène est soignée et l'interprétation est enfin correcte. L'intrigue, moins éparpillée qu'auparavant, s'articule autour d'un laboratoire souterrain (encore !) tenu par un savant fou à la solde d'une corporation maléfique et des survivants de la surface, regroupés autour d'une Milla Jovovich qui se prend pour Mel Gibson. S'il ne transforme pas le plomb en or (le scénario, signé de vous savez qui, est tout aussi merdique qu'avant), Mulcahy emballe néanmoins un film plaisant à suivre. Presque inespéré au regard de ce qui a précèdé. En mettant son héroïne à la tête d'une armée de clones d'elle-même, le final ouvre d'ailleurs des perspectives excitantes pour la suite.       
La suite, elle se nomme AFTERLIFE et RETRIBUTIONS. Les deux bouses, tournées en 3D et en Imax (mais en fait, on s'en fout), voient le retour d'Anderson derrière la caméra. Incapable de construire une mythologie qui se tienne un tant soi peu debout (par exemple, la centaine de clones du troisième opus se limite bizarrement à une poignée durant l'ouverture du quatrième et les pouvoirs d'Alice disparaissent puis réapparaissent sans que cela se justifie réellement), le cinéaste accumule les effets de style ringards (bullet time façon Matrix du pauvre à tous les étages), le fan service idiot et les clins d'oeils stériles aux précédents volets avec force résurrection de protagonistes que l'on croyait envoyés ad patres. La mise en scène est horriblement télévisuelle (dans le meilleur cas), le scénario abscons et l'interprétation bat encore des records de nullité. Irregardable.
Un sixième et dernier (vraiment ?) volet est en cours de préparation. Sincèrement, je suis pas pressé. Fin de transmission.

Alan Wilson 

lundi 1 juin 2015

MAD MAX - FURY ROAD (2015)

Réalisation : George Miller.
Scénario : George Miller, Brendan McCarthy, Nico Lathouris.
Directeur de la photographie : John Seale.
Musique : Junkie XL.
Avec Tom Hardy, Charlize Theron, Nicholas Hoult, Hugh Keays-Byrne, Rosie Huntington-Whiteley, ...
Etats-Unis - Couleurs - 120 minutes.




Mille bornes.

"Le film du siècle !"
"Une bombe !"
"Excitant, surprenant, hors-norme !" 
(j'en passe et des meilleurs ...)
A moins de vivre dans une caverne, totalement coupé de notre civilisation (sur)connectée, il aura été difficile, si ce n'est impossible, d'échapper au torrent de critiques superlatives concernant ce quatrième volet de la saga Mad Max. Lire, entendre et prendre pour argent comptant ces vibrations dithyrambiques juste avant de se précipiter dans la salle de cinéma la plus proche pour apprécier la bête est donc à double tranchant. Soit on ressort déçu en jurant de ne plus jamais se faire avoir, soit on rejoint le cortège des adeptes. Désolé, mais je déteste payer une place de cinoche pour ressortir en tirant la gueule (tout augmente de nos jours, même le prix de la déception) et je ne suis pas un mouton. J'ai préféré attendre, loin de la ferveur, histoire de me faire une idée toute personnelle.  Et sans trop m'avancer, je crois que j'ai eu raison.
Assez tergiversé, plongeons dans le vif du sujet. MAD MAX FURY ROAD, dixième long-métrage du cinéaste australien George Miller et séquelle tardive n'est pas le film du siècle, ni même un chef d’œuvre. Ce n'est pas non plus un film pro-féministe ou écolo. C'est juste un excellent blockbuster mis en scène avec une maîtrise telle qu'il ridiculise la quasi-totalité des films d'action à grand spectacle sortis depuis une dizaine d'années, tous budgets et nationalités confondues. Marvel Studios ? Michael Bay ? Chris Nolan ? les Fast & Furious ? Allez, ouste ! Renvoyés aux bancs de l'école ! Rythme, découpage, lisibilité, ampleur, MAD MAX FURY ROAD n'a de leçons à recevoir de (presque) personne en la matière. D'où l'impression bénie de revenir à une époque où l'on pouvait en prendre plein les yeux sans finir aveugle. C'est donc énorme, inespéré et foutrement réjouissant. Mais ... c'est tout. 
George Miller ne s'en est jamais caché. MAD MAX FURY ROAD a été conçu comme une longue course-poursuite de deux heures et rien d'autre. Un véritable exercice de style. Le storyboard a même précédé (remplacé ?) l'écriture d'un scénario. Une série d'images puissantes, un collage virtuose, en lieu et place d'une histoire à proprement parler. Efficace, oui. Mais également limité. L'action, formidablement généreuse et inventive, introduit un bon paquet de personnages qu'elle ne développe pas, ou si peu. Un seul adjectif suffit généralement à les caractériser. Max est un survivant, Furiosa a la haine, Immortan Joe est un dictateur, les Épouses sont belles, douces et rebelles à la fois. Et ainsi de suite. Du coup, les interactions entre les personnages en souffrent et on se demande souvent pourquoi un tel en déteste un autre, pourquoi un tel se joint à un autre. La victime la plus évidente de cette sur-simplification dramatique est évidemment Max. Personnage sur le fil du rasoir, partagé entre des instincts de bête sauvage et les restes d'une humanité et d'un sens de la justice piétinés par la violence et le chagrin, Max Rockatansky s’accommode bien mal de ces raccourcis. Si Tom Hardy ne parvient jamais à faire oublier Mel Gibson, ce n'est pas vraiment de sa faute. L'acteur est bon, très bon même. Mais comment arriver à imposer sa réinterprétation d'un personnage mythique avec si peu à jouer ? La grande gagnante de l'histoire, comme tout le monde le sait déjà, c'est Charlize Theron, charismatique comme rarement. Elle compose un superbe portrait de guerrière en quête de rédemption. Oh, et puisque l'on cause du casting, une petite injustice se doit d'être réparée. Nicholas Hoult, alias Nux, le warboy, kamikaze mourant rêvant d'un walhalla chromé, est la vraie révélation du film. Entre fragilité, folie, courage et remords, sa prestation est la plus complexe du métrage. Un bel exploit si peu mentionné, c'est un peu triste, non ?
MAD MAX FURY ROAD ne raconte pas grand-chose. Histoire d'un aller et retour. Alliances et confrontations. La folie comme seul horizon. Un minimalisme punk à l'impact immédiat et qui affole les sens et la rétine. Le cerveau reptilien est comblé au-delà de toutes espérances, avec l'art et la manière. Le coeur bat à cent à l'heure. L'âme, elle, crie un peu famine.    
                 
             

dimanche 24 mai 2015

LE SOLITAIRE (1981)

Titre original : Thief.
Réalisation : Michael Mann.
Scénario : Michael Mann, d'après THE HOME INVADERS de Frank Hohimer.
Directeur de la photographie : Donald Thorin.
Musique : Tangerine Dream.
Avec James Caan, Tuesday Weld, Willie Nelson, James Belushi, Robert Prosky, ...
Etats-Unis - Couleurs - 122 minutes.



La nuit lui appartient.

Certains premiers films sont des réussites éclatantes, mais sans lendemain. D'autres, loin d'être des coups de maîtres, s'avèrent tout de même riche de promesses. Michael Mann, lui, est parvenu à faire coup double. LE SOLITAIRE (joli titre français, pour une fois) n'est pas seulement un grand film, c'est aussi un film somme annonçant à lui seul TOUTE la filmographie à venir du cinéaste.
Un peu comme le collage utopiste que Frank (le personnage principal magnifiquement interprété par James Caan) garde sur lui en permanence, imaginant et planifiant son avenir idéal, il est possible de trouver dans chaque plan, scène ou cadrage du film des éléments et des sensations qui seront réutilisés plus tard et ce, jusque dans BLACK HAT sorti début 2015. Ainsi, la plongée vertigineuse dans les méandres des circuits d'un ordinateur en ouverture de ce dernier évoque t-elle sans peine le macro-travelling dans une serrure de coffre-fort durant l'ouverture du SOLITAIRE. De même, la violence et la rapidité avec laquelle Frank coupe les ponts avec son ancienne existence avant d'aller se venger de Leo (Robert Prosky), son employeur diabolique, réapparaît, à l'identique durant le climax de HEAT lorsque Neil McCauley (Robert de Niro) abandonne Eady, sa bien-aimée pour fuir la police après s'être lui aussi fait justice en supprimant le maléfique Waingro. Les exemples sont légions, et on ne va peut-être pas tous les énumérer, mais le fait est que LE SOLITAIRE est une oeuvre essentielle pour qui veut comprendre le cinéma de Michael Mann.
Mais on ne peut pas résumer LE SOLITAIRE a une simple note d'intention, aussi brillante et cohérente soit-elle. C'est aussi et surtout une révolution esthétique, un pur choc sensoriel qui prend aux tripes, une tragédie moderne. Comment ne pas se prendre de passion pour le combat de Frank, criminel virtuose et esclave d'une société avide de broyer quiconque tente de briser ses chaînes, de ne pas jouer selon la règle dominant/dominé ? On croise les doigts pour voir Frank réussir, on trépigne d'impatience et on célèbre en sa compagnie la réussite de ce qu'il considère comme son ultime casse. L'aisance avec laquelle Michael Mann nous embarque aux côtés de son (anti) héros est proprement saisissante. Ses défaites n'en sont que plus poignantes. Au final, et malgré un bref interlude ensoleillé, la nuit finit par tout engloutir. Frank, dépouillé de sa femme, de sa famille, de ses amis et de ses rêves, à son tour, disparaît dans les ténèbres. Mon dieu, quelle fin.

Alan WIlson

samedi 23 mai 2015

LE COMBAT DES REMAKES : PSYCHO (1960) Vs. PSYCHO (1998)



Dans le coin gauche du ring : PSYCHOSE (ça, c'est pour le titre français) est l'un des gros morceaux de la filmo d'Alfred Hitchcock. Tourné en noir et blanc et dans des délais très courts, avec Janet Leigh et Anthony Perkins en têtes d'affiche a révolutionné le cinéma d'horreur par ses coups de théâtre, sa brutalité inédite et sa mise en scène. Gros succès à la clé.



Dans le coin droit du ring : PSYCHO (à la fois le titre américain et le titre français, notez la subtilité) est l'une des bizarreries de la filmo de Gus Van Sant, un des porte-étendards du cinéma indépendant américains, pour le meilleur comme pour le pire. Estimant que le film original était parfait mais qu'il méritait d'être redécouvert par les jeunes générations sans souffrir du barrage du statut de vieux classique poussiéreux, il s'est donc lancé dans un drôle d'exercice de style en refaisant le même film au plan près. La couleur en plus. Et avec un nouveau casting. Gros bide à la clé.



Ce qui fonctionne dans l'original : Plus ou moins tout. Film de psycho-killer tordu et lourd de sous-entendus, PSYCHOSE multiplie les twists dont un d'anthologie en fin de premier acte. Une véritable leçon de mise en scène, de découpage et de montage, le shocker d'Alfred HItchcock est un cas d'école. Maintes fois parodié et/ou plagié, il mérite haut la main son label de classique immortel. Et il serait criminel d'oublier l'interprétation très ambigue de l'excellent Anthony Perkins.



Ce qui ne fonctionne pas dans l'original : On serait tenté de dire rien, mais ce serait oublier des seconds rôles un peu fades et interpréter sans une once de panache. Heureusement, l'attrait du film est ailleurs. Mais il fallait que ce soit dit.



Ce qui fonctionne dans le remake : Par la force du copier/coller, une immense majorité des qualités de l'original perdurent dans ce remake. La narration et le scénario sont donc impeccables. Mais ce PSYCHO possède tout de même des qualités qui lui sont propres, notamment la photo de Chris Doyle, la réorchestration agressive du score de Bernard Hermann par Danny Elfman et surtout l'interprétation joliment malsaine de Norman Bates par Vince Vaughn, preuve que l'acteur de SWINGERS vaut bien mieux que les comédies dans lesquelles il semble s'être enfermé depuis.


Ce qui ne fonctionne pas dans le remake : Bizarrement, le problème des seconds rôles, confiés ici à des acteurs talentueux (Julianne Moore, Viggo Mortensen, William H. Macy, excusez du peu), demeure d'un film à l'autre. Ils ne sont donc pas plus étoffés ici. Et puis il y a la question des modifications, très brêves, apportées par Van Sant en personne. Efficaces sur le moment, elles ont malheureusement la mauvaise idée d'expliciter certains aspects volontairement suggérés dans le film original. Bien que faisant froid dans le dos, la masturbation, désormais évidente, de Norman Bates observant une Marion Crane sur le point de prendre sa dernière douche en rajoute inutilement dans la perversion du personnage. On ne se demande plus ce qui ne tourne pas rond chez lui, on s'en doute désormais fortement. Dernier point noir, la prestation moyennement convaincante de Anne Heche loin, bien loin même, d'égaler le mélange de vulnérabilité et de sex-appeal de Janet Leigh.

Au final ... Bien qu'un peu oublié aujourd'hui, le remake opéré par Gus Van Sant mérite franchement le coup d'oeil et pas seulement pour jouer au jeu des sept erreurs avec l'original. C'est un hommage réussi, formellement très élégant, et même surprenant à bien des égards. On aurait donc tort de le snober en le traitant de simple copie. Défaite aux poings, mais bel effort du challenger.

Alan Wilson 

LE PORTRAIT AZIMUTE - MAGGIE GYLLENHAAL


"Having an education is invaluable" (Maggie Gyllenhaal)

"Sois-belle et tais-toi." Très peu pour Maggie Gyllenhaal. Fille de la scénariste et réalisatrice Naomi Foner Gyllenhaal et du réalisateur et poète Stephen Gyllenhaal (respectivement à ces postes sur le drame LOSING ISAIAH - LES CHEMINS DE L'AMOUR) et grande soeur de Jake (sa bio, ce sera pour une autre fois, hein !), l'actrice n'a rien d'une potiche. A 37 ans, elle n'a pas hésité, il y a quelques jours de cela, à dénoncer le sexisme d'Hollywood en révélant s'être vue refusé un rôle parce qu'étant ... trop vieille.
Grande, élégante, une beauté naturelle, un regard farouchement indépendant, Maggie Gyllenhaal s'inscrit dans la lignée d'actrices telles que SIgourney Weaver ou encore Katharine Hepburn. Sa personnalité semble d'ailleurs déborder sur chacun de ses rôles.

"You can go suck a fuck."

Se faire un nom sans s'éloigner du cercle familial. Se faire un prénom, en fait. C'est l'opportunité présentée par DONNIE DARKO. Maggie y interprète la soeur de l'anti-héros que joue son propre frère, Jake. Son temps de présence à l'écran est limité. Mais elle fait preuve d'un sacré naturel. En un seul regard, bouleversant, lors du climax, elle parvient à faire passer un sacré torrent d'émotions. Sans que l'on trouve à y redire, elle est l'AUTRE révélation du petit bijou de Richard Kelly.

"Does this look sexual to you ?"

Un rôle risqué. Comment jouer une femme dominée dans un film traitant du sadomasochisme et des relations employée/employeur sans passer pour un objet de phantasme sexuel pour le spectateur ? Maggie Gyllenhaal y parvient en se fondant dans un personnage paradoxale, riche et finement écrit. Lee Holloway n'est ni une sainte nitouche, ni une cruche. Bien au contraire, elle est formidablement intelligente. Mais aussi émotionnellement instable. L'actrice joue donc tout autant de son physique (c'est inévitable dans une telle situation) que de son regard et de son ton de voix. Sur le fil du rasoir, la prestation est incroyable. 

  "You make your own luck."

Pas facile de reprendre un rôle écrit pour quelqu'un d'autre dans un blockbuster adapté d'une bande-dessinée ultra-populaire. Maggie Gyllenhaal en fait l'expérience dans THE DARK KNIGHT. Elle succède ainsi à Katie Holmes (absente pour cause de scientologie aïgue) dans la peau de Rachel Dawes, femme de loi au centre d'un triangle amoureux avec Bruce Wayne/Batman et Harvey Dent. Une femme forte et idéaliste qui se bat avec son cerveau et qui tente de faire le tri dans ses sentiments sans se perdre en chemin. Un rôle idéal pour l'actrice. Elle base son interprétation sur celle de Holmes puis elle prend ses marques, scène après scène, façonnant une Rachel Dawes plus solide, plus ... femme. Sa silhouette et sa gestuelle l'éloignent de l'image de femme-enfant que trimballait le personnage dans BATMAN BEGINS. Scellant la tragédie du dernier acte, sa dernière scène est bigrement émouvante.

"Oh, I made a lot of mistakes. I'm just trying not to make 'em twice."

De la jeune carrière de Maggie Gyllenhaal, s'il fallait à l'auteur de ces lignes ne retenir qu'un seul rôle, ce serait sans doute celui-ci. Son couple, condamné d'avance à l'échec, avec le chanteur de country alcoolique incarné par l'immense Jeff Bridges est le coeur (fragile) de CRAZY HEART, drame musical de haute volée signé Scott Cooper, acteur reconverti dans la réalisation (LES BRASIERS DE LA COLERE et le très alléchant BLACK MASS avec Johnny Depp chauve). Journaliste et mère divorcée, Jean Craddock est un personnage qui témoigne de l'instinct très sûr avec lequel Maggie Gyllenhaal sait faire exister une femme ordinaire sans en faire des caisses. Les oscars ne s'y sont pas trompés en la récompensant d'une nomination on ne peut plus justifiée.

Alan Wilson 

LE PORTRAIT AZIMUTE : KURT RUSSELL



"When you think you're good, you will play at that level. If you doubt yourself, you will play like crap." Kurt Russell.


Cette citation, on pourrait tout autant l'appliquer au métier d'acteur qu'au baseball, un sport qui compte beaucoup aux yeux de l'acteur. Son père, l'acteur Bing Russell (mort en 2003, on se souvient surtout de lui pour son rôle régulier dans la série BONANZA) était aussi un ancien joueur et le propriétaire de l'équipe des Mavericks de Portland et sa soeur est la mère du joueur professionnel Matt Franco (pour ceux qui connaissent). La comédie et le baseball donc. Les deux facettes de Kurt Russell. Plus américain, tu meurs. Et c'est précisément ce qui fait tout son charme. Loin de la "méthode" de l'Actor's Studio, loin de la noblesse suave des acteurs shakespeariens, le jeu de Kurt Russell perpétue une vieille tradition hollywoodienne. Une bonne dose de professionnalisme, un charisme viril bien dosé et un zeste de (fausse) légèreté qui donne au public une impression de facilité mais qui témoigne en réalité d'une maîtrise constante. No bullshit, just acting.

"I'll let you go this one time

Qui se souvient de Rox et Rouky (The Fox & The Hound chez l'Oncle Sam) ? Ce dessin animé des studios Disney, sorti en 1981, n'est pas un grand classique, loin s'en faut, mais son histoire ne manque pas de coeur et milite fièrement pour la cause animale. Kurt Russell y prête sa voix à Rouky (avec Corey Feldman qui interprète le personnage version chiot), chien de chasse ami d'un renard. C'est là l'une des nombreuses participations de l'acteur aux productions de la firme de l'oncle Walt. Acteur depuis l'enfance (parmi des dizaines d'apparitions, on retiendra celle dans la série LE FUGITIF), Il aura même été sous contrat avec DIsney dix années durant. Il inaugure le dit contrat en 1966 à l'âge de quinze ans avec DEMAIN, DES HOMMES (Follow Me, Boys !) de Norman Tokar, aux côtés de Fred MacMurray et Lillian Gish. Bon échange de procédé. Son visage poupin fait merveille tandis que "l'école" Disney le forme au métier avec des bases aussi solides qu'old school.


 "When I get back, I'm going to kill you."

Rencontre avec un personnage, Snake Plissken.
Rencontre avec un réalisateur, John Carpenter.
Un film culte, gravé dans les mémoires, NEW YORK 1997 (Escape From N.Y.).
Bon, en fait, Russell et Carpenter se sont rencontrés avant, sur LE ROMAN D'ELVIS, un solide biopic du KIng réalisé pour la télévision. Si le jeune acteur a pu se glisser avec autant d'aisance dans la peau d'Elvis Presley, s'effaçant derrière le mythe, pas de doutes possibles, il saura incarner un pistolero du futur, borgne et nihiliste. Le pari était pourtant risqué, Snake Plissken faisant figure de contre-emploi absolu pour un jeune acteur sorti de l'écurie DIsney. Gestuelle à la fois minimaliste et relâchée témoignant de la profonde lassitude d'un guerrier aux réflexes meurtriers, barbe de trois jours et voix rocailleuse, Plissken est en quelque sorte le descendant futuriste de l'Homme sans Nom qu'interprétait Clint Eastwood dans les westerns de Sergio Leone. Mais si l'inspiration est évidente, Kurt Russell lui donne une personnalité propre, bien plus sombre et agressive.
Et la collaboration entre l'acteur et le réalisateur ne s'arrête heureusement pas là. Le respect et l'amitié aidant, ils vont encore remettre le couvert trois fois. Dans THE THING, remake de LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE de Howard Hawks et Christian Nyby, Russell joue R.J. MacReady, pilote d'hélico taciturne à la barbe bien fournie. Un penchant pour l'alcool, la solitude et le sombrero (par -15°c, c'est amusant) sont les caractéristiques de cet homme finalement bien ordinaire. Humble, l'acteur joue volontairement en retrait, évitant de tirer la couverture à lui. Vient ensuite le feu d'artifice LES AVENTURES DE JACK BURTON DANS LES GRIFFES DU MANDARIN (Big Trouble in Little China). Fausse tête d'affiche mais vrai sidekick du héros chinois, Jack Burton est un camionneur fort en gueule mais pas forcément fûté. Kurt Russell déploie des trésors comiques, enchaîne les punchlines délicieuses ("It's all in the reflexes") et signe l'un de ses plus grandes compositions. Il n'est d'ailleurs pas interdit de retrouver de fortes similitudes dan son Gabe Cash, superflic macho et prolo du buddy-movie très bis TANGO & CASH avec Sly Stallone. Enfin, en 1996, Kurt redevient Snake. LOS ANGELES 2013 (Escape From L.A.) est une suite en forme de remake, une satire féroce et cartoonesque du politiquement correct à l'américaine, malheureusement entâchée par des effets spéciaux catastrophiques. Mais ce dernier tandem avec John Carpenter ne démérite pas. Snake a vieilli mais n'a pas changé.

 "Hell's coming with me !"

Wyatt Earp est bien plus qu'un simple personnage historique, c'est une légende de l'Ouest Américain. Randolph Scott, Henry Fonda, Burt Lancaster, ou encore James Garner (2 fois !) se sont succédés dans la peau du célèbre marshall. Et la liste n'est pas exhaustive. Au risque de déclencher des querelles de clocher et des duels en pagaille, j'oserai toutefois affirmer que Kurt Russell est assurément celui qui en a livré l'interprétation la plus mémorable, fiévreuse et iconique. Alors que dans WYATT EARP, fabuleux biopic signé Lawrence Kasdan, Kevin Costner s'attachait à débusquer l'homme derrière le mythe, TOMBSTONE, le projet concurrent sorti six mois plus tôt et mené par Russell en tête d'affiche fait, lui, tout le contraire. Regard d'acier, port impeccable, moustaches de prédateurs et la réplique cinglante, Wyatt Earp est iconisé comme jamais et ce, dès sa première apparitions. Donnant tout, comme s'il en avait en charge de jouer Dieu le Père, Kurt Russell joue de la contradiction d'un héros cherchant à tout prix à rejoindre le commun des mortels (famille, boulot, tout ça, tout ça) avant de céder complètement à sa nature profonde de pistolero invincible et vengeur. Inoubliable. Juste à titre d'anecdote, histoire de bien comprendre à quel point le rôle tient une place spéciale dans le coeur de l'acteur, sachez tout de même qu'il a baptisé son propre fils Wyatt.

 "Well, Pam ... Which way you going ? Left or right ?"

 Même s'il n'a rien fait pour empêcher ça, Kurt Russell est devenu un acteur culte un peu malgré lui. THE THING ou BIG TROUBLE IN LITTLE CHINA aurait pu être des cartons au box-office mais, au lieu de ça, ils se sont d'abord plantés avant de devenir des succès de vidéo-clubs. STARGATE, ULTIME DECISION, BREAKDOWN ou encore SOLDIER, quoi que l'on en pense, dégagent tous un véritable parfum de série B. Il était inévitable qu'il rejoigne le casting d'un film de Quentin Tarantino, cinéphile acharné et grand amateur de stars en perte de vitesse et au physique buriné. Sa performance dans BOULEVARD DE LA MORT est le reflet de toute une carrière. Entre virilité exacerbée et ironie sous-jacente. Stuntman Mike alterne charisme, menace et ... une vulnérabilité hilarante.
Depuis, Kurt Russell a marqué FAST & FURIOUS 7, carton mondial, de sa présence dans un rôle spécialement écrit à sa mesure, et, surtout, il a rejoint la bande de HATEFUL EIGHT, un western (encore) de Quentin Tarantino (encore). Sa carrière ne pouvait se poursuivre sous de meilleurs auspices.

Alan Wilson

vendredi 22 mai 2015

NOUVELLES RUBRIQUES



Après un sérieux coup de mou, c'est officiel, le blog va reprendre du poil de la bête. Outre les habituelles critiques, des portraits d'acteurs et d'actrices, de cinéastes et autres artistes inestimables du 7ème Art vont venir s'étaler dans nos belles colonnes numériques. Pour débuter cette série de portraits, j'ai décidé de respecter la parité. Un homme et une femme. Chabadababa. L'immortelle Snake Plissken (alias Kurt Russell) et une secrétaire suffisamment téméraire pour renvoyer Christian Grey pleurer dans les jupons de sa maman (la talentueuse Maggie Gyllenhaal, sœur de) ont l'immense honneur d'ouvrir le bal. Notez que, moi blogueur, je m'engage à respecter cette parité.
Autre rubrique, le combat des remakes. Le but du jeu est simple. Deux films, l'original et le remake, s'affrontent par le biais de ma plume aussi humble que génialement talentueuse. Des matches nuls ne sont pas à exclure. Il va y avoir du sang et des larmes. Bref, ça va chier.
En attendant, bonne lecture, bons films, bontempi.

Alan Wilson

samedi 16 mai 2015

MICHAEL KOHLHAAS (2013)

Réalisation : Arnaud des Pallières.
Scénario : Christlle Berthevas, Arnaud des Pallières, d'après le roman de Heinrich Von Kleist.
DIrecteur de la photographie : Jeanne Lapoirie.
Musique : Martin Wheeler et les Witches.
Avec Mads Mikkelsen, Delphine Chuillot, Bruno Ganz, Mélusine Mayance, David Bennent, Denis Lavant, ...
France/Allemagne - Couleurs - 122 minutes.




Don't fuck with Mads.

MICHAEL KOHLHAAS est un sacré film qui n'a pas eu la reconnaissance qu'il mérite, premier fait.
MICHAEL KOHLHAAS est vraiment un sacré putain de film qui ne cherche ni la reconnaissance, ni les honneurs, ni la sympathie du public ou de la critique, second fait.
L'histoire de ce marchand de chevaux droit dans ses bottes qui cherche à obtenir justice par tous les moyens après qu'un seigneur lui ait fait du tort (et pas qu'un peu) n'est pas nouvelle. Volker Schlondorff, le réalisateur du TAMBOUR, en avait d'ailleurs une première adaptation en 1969 avec David Warner dans le rôle-titre. Et l'on ne manquera pas non plus d'y trouver des points communs avec BRAVEHEART (1995) et ROB ROY (1995 aussi), deux films que l'on ne présente plus et qui usent peu ou prou des mêmes ressorts dramatiques. Les partis-pris anti-spectaculaires du réalisateur Arnaud des Pallières, plutôt gonflés, font toute la différence.
Au romantisme, au lyrisme, au grand spectacle et à la catharsis habituellement de rigueur, des Pallières privilégie un naturalisme à la fois splendide formellement et farouchement austère dans ses émotions. La musique aussi sait se faire discrète, évitant les envolées. La violence, bien que très présente, évite d'être trop frontale ou gratuite. Le sang n'a guère besoin de couler à flots pour que l'on sente sa chaleur poisseuse se répandre. Logique et cohérent finalement puisque le film tout entier est façonné à l'image de son héros, magnifiquement interprété par un Mads Mikkelsen stoïque, tout en colère contenue. Voir l'acteur s'exprimer (parfois difficilement) en français, une langue qu'il ne connaît pas, peut s'avérer déstabilisant au début. Mais, sur la durée, cette particularité renforce encore un peu plus la singularité de cet anti-héros, homme de peu de mots, farouchement protestant.
Il faut savoir ouvrir grand ses yeux et ses oreilles, faire preuve de patience, se laisser hypnotiser par la beauté des images et lutter contre certaines frustrations (le traitement elliptique et minimaliste de la révolte menée par Kohlhaas peut faire grincer des dents) pour apprécier le film d'Arnaud des Pallières. La récompense vient à la toute fin, lors d'un dernier plan tétanisant. 

Alan Wilson   



vendredi 15 mai 2015

AVENGERS - L'ERE D'ULTRON (2015)

Titre original : Avengers - Age of Ultron.
Réalisateur : Joss Whedon.
Scénariste : Joss Whedon, d'après les personnages créés par Stan Lee et Jack Kirby.
Directeur de la photographie : Ben Davis.
Musique : Brian Tyler, Danny Elfman.
Avec Robert Downey Jr., Chris Evans, Mark Ruffalo, Chris Hemsworth, Scarlett Johansson, Jeremy Renner, James Spader, ...
Etats-Unis - Couleurs - 141 minutes.



"Il est où le réalisateur ?"
Matière grasse.

Il ne faut pas se fier au carton mondial du nouveau "film" des studios Marvel. Rarement une telle montagne de dollars aura eu autant de mal à dissimuler un échec de cet ampleur. AVENGERS - L'ERE D'ULTRON fait plus que toucher du doigt les limites de la formule Marvel. Il grille en fait tous les feux rouges. AVENGERS - L'ERE D'ULTRON est bien un échec, oui. Un échec artistique qui risque de mettre en danger, non pas le septième Art comme on a pu le lire un peu partout, mais bien les studios Marvel s'il n'y prenne pas garde.
Evacuons d'emblée les banalités. Non, le film de Joss Whedon n'est pas une bouse honteuse, un nanar sans nom. Il y a de l'action (beaucoup), de l'humour (trop), des effets spéciaux en pagaille, un casting maousse qui fait bien le boulot et on ne s'ennuie pas trop. C'est un peu comme se goinfrer un Big Mac. C'est pas de la grande cuisine, mais ça remplit gentiment la panse. Le problème, c'est que l'on se demande s'il s'agit bien d'un film de Joss Whedon. Le cinéaste/über-geek avait de folles ambitions pour cette suite, ainsi que des références excitantes (LE PARRAIN II, L'EMPIRE-CONTRE-ATTAQUE). Le groupe devait se déchirer sous la pression de conflits internes insolubles. Le méchant Ultron serait d'un tout autre niveau que Loki. La lutte fratricide et destructrice entre Hulk et Iron Man serait tout autant un pur morceau de bravoure que le pic dramatique et émotionnel du film. Bref, on allait voir ce qu'on allait voir. Vu le sacré miracle que représentait AVENGERS (rendre cohérent et plaisant un crossover à priori impossible entre différentes franchises super-héroïques), on était prêt à croire que Whedon tiendrait ses promesses. On se disait, surtout, que Whedon aurait les coudées franches pour réaliser le film qu'il voudrait. On avait tort. 
"L'affaire" Edgar Wright, démissionnaire d'ANT-MAN suite à des différents artistiques aurait dû nous mettre la puce à l'oreille. Kevin Feige, grand gourou des productions Marvel, a beau claironner à longueur d'interviews que chaque nouveau film est une prise de risque, une audace, il ment comme un arracheur de dents. Tout est calculé, planifié, maîtrisé. Et malheur à celui qui osera sortir des clous. Quelle que soit le plaisir que l'on peut y prendre (ou pas), IRON MAN 3, THOR LE MONDE DES TENEBRES et même LES GARDIENS DE LA GALAXIE et CAPTAIN AMERICA - LE SOLDAT DE L'HIVER ne sont rien d'autres que des clones d'AVENGERS premier du nom. Même cool attitude, même profusion de personnages en forme de clin d'oeil (on appelle ça du fan service et c'est de plus en plus gonflant), même goût pour la destruction massive en numérique et les menaces venues du ciel. C'est TOUJOURS le même film et AVENGERS - L'ERE D'ULTRON pousse cette fois-ci le bouchon trop loin. Clairement, le film souffre de sa boulimie. Au milieu de ce spectacle permanent et parfois épuisnat, les éléments qui tenaient le plus à coeur à Whedon (les jumeaux Maximoff, le psychopathe Ultron, les luttes internes) peinent à exister. Le cinéaste et scénariste a une voix et un style bien à lui. Qu'il est triste de le voir jouer le fonctionnaire aphone, le mercenaire servile. Lors d'un épilogue convenu, on peut voir un Tony Stark bizarrement inexpressif quitter l'équipe des Avengers. Joss Whedon en a fait autant. Il laisse le fardeau à d'autres (les frères Russo) et s'en va, exsangue. 
Ainsi, Marvel, incapable de se renouveler, pris au piège de sa propre formule, a préféré faire fuir l'un de ses cerveaux ou, du moins, l'un des artisans de son succès d'aujourd'hui. Les ennuis ne vont donc pas tarder et, au premier bide (car ça leur pend au nez), Kevin Feige et Disney s'en mordront les doigts. Je connais des grenouilles qui ont éclaté pour moins que ça. 

Alan Wilson.       


lundi 11 mai 2015

NIXON (1995)

Réalisation : Oliver Stone.
Scénario : Stephen J. Rivele, Christopher Wilkinson, Oliver Stone.
Directeur de la photographie : Robert Richardson.
Musique : John Williams.
Avec Anthony Hopkins, Joan Allen, Paul Sorvino, Bob Hoskins, Powers Boothe, James Woods, Ed Harris, ...
Etats-Unis - Couleurs - 192 minutes (director's cut : 212 minutes).

Dans la peau de Richard Nixon.





C'est bien connu, le réalisateur et scénariste Oliver Stone éprouve une fascination sans bornes pour les figures controversées et la polémique (j'étais sur le point de vous donner des exemples mais non, j'ai plus envie, vous connaissez la filmo du bonhomme ... sinon, il reste wikipédia). En réalisant NIXON, biopic, donc, de Richard Nixon (j'étais sur le point de vous faire la bio du bonhomme mais bon ... wikipédia again), il prouve également qu'il n'est pas rancunier. 
Car le président Nixon (ici joué par Anthony Hopkins, mi-ogre, mi-Caliméro), comme son prédécesseur, le texan Lyndon B. Johnson, a envoyé des jeunes américains se faire trucider par milliers dans le bourbier vietnamien, parmi lesquels, justement, Oliver Stone. Le cinéaste avait beau être volontaire, il n'a pas oublié l'horreur et l'absurdité de ce conflit. Un conflit, d'ailleurs, que Nixon n'avait pas hésité à intensifier brutalement avec sa théorie du "fou". Témoin direct des conséquences sanglantes de l'inflexibilité de Nixon, Oliver Stone aurait eu tous les droits de le haïr. Non, au lieu de ca, il préfère disséquer le mythe, entrer dans la tête de Richard Nixon pour mieux le comprendre et, peut-être - qui sait ? - le réhabiliter. 
Passé un prologue exposant les prémices du scandale du Watergate (wikipédia, mesdames et messieurs, vous tend les bras), le métrage enchaîne directement sur un président Nixon aux abois, de plus en plus seul, et bientôt contraint de démissionner, renonçant ainsi à contre-cœur à un pouvoir qu'il a tant désiré et qu'il a conquis en hypothéquant son âme et son équilibre mental. Il fait nuit, un orage gronde et la Maison Blanche est semblable à un manoir hanté. Partant de cette sublime et lugubre entrée en matière, Stone lance la machine à flash-backs, laissant son montage dériver au fil des souvenirs. Jeunesse difficile et tragique, campagnes politiques pleines de désillusions, rencontres déterminantes. Tout y passe, avec un sens du détail incroyable. Mais NIXON ne se résume pas à une stérile leçon d'histoire. 
Le cœur du film est ailleurs. Dans la schizophrénie de Nixon, un homme double. Stone explore cette facette en jouant sur deux couples. Le couple entre Nixon et sa femme, Pat (Joan Allen, dans son plus beau rôle) d'un côté. Un amour véritable, profond, chaleureux, unit ces deux âmes. Mais il y a aussi le couple Nixon/Hoover (Bob Hoskins, diaboliquement taillé pour interpréter le tant redouté créateur du FBI) , nettement plus intrigant, faustien même. Une scène, exclusive à la version longue, renforce la relation sulfureuse entre ces deux hommes de pouvoir puisque Stone n'hésite pas à faire de Hoover celui qui suggère à Nixon d'enregistrer toutes ses conversations dans le Bureau Ovale. Ce sont ces enregistrements en question qui conduiront, entre autre, à la chute du président. Vous avez dit ambigu ?
Figurant parmi les échecs publics et critiques d'Oliver Stone, NIXON a beaucoup souffert de la comparaison avec JFK, certains pointant du doigt une narration moins fluide (comprendre elliptique et non-linéaire) ou encore le manque de sympathie des personnages (forcément, entre ceux, dans JFK, qui cherche à déterrer la vérité et ceux, dans NIXON, qui cherche à la dissimuler, il y a un sacré fossé). Si l'Histoire oblige les deux films à se recouper, ils n'ont pourtant que peu de points communs. JFK est un thriller juridique, NIXON est un biopic quasi-shakespearien. W., autre biopic sur un drôle de président, serait une comparaison plus judicieuse. Il faut donc revoir NIXON, avec un regard neuf. C'est du grand, du très grand cinéma. 
 
Alan Wilson.

mercredi 22 avril 2015

CAPITAINES D'AVRIL (2000)

Titre original : Capitães de Abril.
Réalisation : Maria de Medeiros.
Scénario : Maria de Medeiros, Eve Deboise.
Directeur de la photographie : Michel Abramowicz.
Musique : Antonio Victorio d'Almeida.
Avec Stefano Accorsi, Maria de Medeiros, Joaquim de Almeida, ...
Portugal / Italie / Espagne / France - Couleurs - 123 minutes.

Des héros si discrets.


Que l'on ne si trompe pas, CAPITAINES D'AVRIL a beau être une coproduction européenne, c'est un film à 100% portugais. De par son sujet bien sûr (la Révolution des Oeillets des 24 et 25 avril 1974 qui renversa la dictature héritée de Salazar) mais aussi, et surtout, par le ton adopté. C'est là un cinéma suffisamment rare (et donc précieux) pour mériter que l'on s'attarde sur le long-métrage de l'actrice-réalisatrice Maria de Medeiros, inoubliable compagne au grand regard d'enfant innocente de Bruce Willis dans PULP FICTION, quel que soit ses défauts. Et il y en a. Malheureusement.
Pour raconter cette drôle de révolution pacifiste menée par des militaires, Maria de Medeiros a choisi de faire se dérouler en parallèle trois récits. Il y a la quête desespéré d'Antonia (Maria de Medeiros) pour faire libérer un étudiant accusé de terrorisme et torturé par la PIDE (l'équivalent portugais de la Stasi Est-Allemande), la prise de contrôle d'une station de radio de LIsbonne par Manuel, le mari d'Antonia et ancien militaire hanté par ses actes dans les colonies africaines, et, enfin, l'insurrection militaire mené par l'idéaliste capitaine Salgueiro Mala (un authentique héros local, joué par l'italien Stefano Accorsi). Disons-le tout de suite, les scènes qui concernent Maria de Medeiros actrice sont hautement dispensables. Très maladroite et sans intérêt réel, si ce n'est pour une révélation tardive assez artificielle, cette intrigue ralentit la narration et alourdit souvent le propos. Fort heureusement, elle n'occupe que la portion congrue du métrage. Et la réalisatrice de se distinguer en posant sur l'Histoire récente de son pays un regard doux-amer où l'héroÏsme et l'idéalisme cède vite la place à la désillusion et à la résignation. Une révolution, nous dit-elle, est éphémère. Et les héros aussi. Lors d'une scène proprement stupéfiante, le capitaine Mala et Manuel, tente de traverser en voiture la foule qui se masse autour d'une caserne où étaient détenus les prisonniers politiques. En raison de leur uniforme, les deux héros sont pris pour des agents de la PIDE et violemment pris à parti. Sur la plage arrière, la fille de Manuel observe, effrayée, des poings avides de vengeance s'abattre sur la carosserie et les vitres du véhicule. Ils ne devront leur salut qu'à un vieil homme qui les a reconnus. La colère, instantanément, cède la place aux applaudissements. Il en faut peu, si peu, pour que le vent tourne. Cette scène résonne comme un écho de bien d'autres scènes antérieures. Des retrouvailles chaleureuses dans un bar mais qui finissent en bagarre. La tension d'une irruption armée dans une station de radio qui se transforme en grande fête collégiale. Ou encore ce très beau moment, totalement vrai, où le capitaine Mala, encore lui, s'avance drapeau blanc à la main vers les troupes gouvernementales, certain de se faire tirer dessus, mais voit, au dernier moment, les soldats du camp adverse refuser d'ouvrir le feu et le rejoindre lui et ses régiments d'insurgés. C'est là le regard d'une femme, souvent amusée et attendrie, jamais naïve, sur ces hommes, un peu pied nickelés et héros d'un jour.
Propre sur elle et très professionnelle, la mise en scène ne s'élève néanmoins jamais plus haut que celle d'un honnête téléfilm de luxe. Le souffle nécessaire à un tel sujet manque donc un peu à l'appel. Un peu gênant mais l'intérêt de CAPITAINES D'AVRIL est ailleurs. Le film de Maria de Medeiros aborde un sujet méconnu mais fascinant, se montre très à l'aise dans des scènes intimistes à la portée aussi humaniste que politique et nous fait espérer que d'autres réalisateurs et réalisatrices s'intéressent encore à l'avenir à l'histoire du Portugal. Elle mérite d'être racontée.

Alan Wilson