Blog cinéma d'utilité publique

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samedi 23 mai 2015

LE PORTRAIT AZIMUTE : KURT RUSSELL



"When you think you're good, you will play at that level. If you doubt yourself, you will play like crap." Kurt Russell.


Cette citation, on pourrait tout autant l'appliquer au métier d'acteur qu'au baseball, un sport qui compte beaucoup aux yeux de l'acteur. Son père, l'acteur Bing Russell (mort en 2003, on se souvient surtout de lui pour son rôle régulier dans la série BONANZA) était aussi un ancien joueur et le propriétaire de l'équipe des Mavericks de Portland et sa soeur est la mère du joueur professionnel Matt Franco (pour ceux qui connaissent). La comédie et le baseball donc. Les deux facettes de Kurt Russell. Plus américain, tu meurs. Et c'est précisément ce qui fait tout son charme. Loin de la "méthode" de l'Actor's Studio, loin de la noblesse suave des acteurs shakespeariens, le jeu de Kurt Russell perpétue une vieille tradition hollywoodienne. Une bonne dose de professionnalisme, un charisme viril bien dosé et un zeste de (fausse) légèreté qui donne au public une impression de facilité mais qui témoigne en réalité d'une maîtrise constante. No bullshit, just acting.

"I'll let you go this one time

Qui se souvient de Rox et Rouky (The Fox & The Hound chez l'Oncle Sam) ? Ce dessin animé des studios Disney, sorti en 1981, n'est pas un grand classique, loin s'en faut, mais son histoire ne manque pas de coeur et milite fièrement pour la cause animale. Kurt Russell y prête sa voix à Rouky (avec Corey Feldman qui interprète le personnage version chiot), chien de chasse ami d'un renard. C'est là l'une des nombreuses participations de l'acteur aux productions de la firme de l'oncle Walt. Acteur depuis l'enfance (parmi des dizaines d'apparitions, on retiendra celle dans la série LE FUGITIF), Il aura même été sous contrat avec DIsney dix années durant. Il inaugure le dit contrat en 1966 à l'âge de quinze ans avec DEMAIN, DES HOMMES (Follow Me, Boys !) de Norman Tokar, aux côtés de Fred MacMurray et Lillian Gish. Bon échange de procédé. Son visage poupin fait merveille tandis que "l'école" Disney le forme au métier avec des bases aussi solides qu'old school.


 "When I get back, I'm going to kill you."

Rencontre avec un personnage, Snake Plissken.
Rencontre avec un réalisateur, John Carpenter.
Un film culte, gravé dans les mémoires, NEW YORK 1997 (Escape From N.Y.).
Bon, en fait, Russell et Carpenter se sont rencontrés avant, sur LE ROMAN D'ELVIS, un solide biopic du KIng réalisé pour la télévision. Si le jeune acteur a pu se glisser avec autant d'aisance dans la peau d'Elvis Presley, s'effaçant derrière le mythe, pas de doutes possibles, il saura incarner un pistolero du futur, borgne et nihiliste. Le pari était pourtant risqué, Snake Plissken faisant figure de contre-emploi absolu pour un jeune acteur sorti de l'écurie DIsney. Gestuelle à la fois minimaliste et relâchée témoignant de la profonde lassitude d'un guerrier aux réflexes meurtriers, barbe de trois jours et voix rocailleuse, Plissken est en quelque sorte le descendant futuriste de l'Homme sans Nom qu'interprétait Clint Eastwood dans les westerns de Sergio Leone. Mais si l'inspiration est évidente, Kurt Russell lui donne une personnalité propre, bien plus sombre et agressive.
Et la collaboration entre l'acteur et le réalisateur ne s'arrête heureusement pas là. Le respect et l'amitié aidant, ils vont encore remettre le couvert trois fois. Dans THE THING, remake de LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE de Howard Hawks et Christian Nyby, Russell joue R.J. MacReady, pilote d'hélico taciturne à la barbe bien fournie. Un penchant pour l'alcool, la solitude et le sombrero (par -15°c, c'est amusant) sont les caractéristiques de cet homme finalement bien ordinaire. Humble, l'acteur joue volontairement en retrait, évitant de tirer la couverture à lui. Vient ensuite le feu d'artifice LES AVENTURES DE JACK BURTON DANS LES GRIFFES DU MANDARIN (Big Trouble in Little China). Fausse tête d'affiche mais vrai sidekick du héros chinois, Jack Burton est un camionneur fort en gueule mais pas forcément fûté. Kurt Russell déploie des trésors comiques, enchaîne les punchlines délicieuses ("It's all in the reflexes") et signe l'un de ses plus grandes compositions. Il n'est d'ailleurs pas interdit de retrouver de fortes similitudes dan son Gabe Cash, superflic macho et prolo du buddy-movie très bis TANGO & CASH avec Sly Stallone. Enfin, en 1996, Kurt redevient Snake. LOS ANGELES 2013 (Escape From L.A.) est une suite en forme de remake, une satire féroce et cartoonesque du politiquement correct à l'américaine, malheureusement entâchée par des effets spéciaux catastrophiques. Mais ce dernier tandem avec John Carpenter ne démérite pas. Snake a vieilli mais n'a pas changé.

 "Hell's coming with me !"

Wyatt Earp est bien plus qu'un simple personnage historique, c'est une légende de l'Ouest Américain. Randolph Scott, Henry Fonda, Burt Lancaster, ou encore James Garner (2 fois !) se sont succédés dans la peau du célèbre marshall. Et la liste n'est pas exhaustive. Au risque de déclencher des querelles de clocher et des duels en pagaille, j'oserai toutefois affirmer que Kurt Russell est assurément celui qui en a livré l'interprétation la plus mémorable, fiévreuse et iconique. Alors que dans WYATT EARP, fabuleux biopic signé Lawrence Kasdan, Kevin Costner s'attachait à débusquer l'homme derrière le mythe, TOMBSTONE, le projet concurrent sorti six mois plus tôt et mené par Russell en tête d'affiche fait, lui, tout le contraire. Regard d'acier, port impeccable, moustaches de prédateurs et la réplique cinglante, Wyatt Earp est iconisé comme jamais et ce, dès sa première apparitions. Donnant tout, comme s'il en avait en charge de jouer Dieu le Père, Kurt Russell joue de la contradiction d'un héros cherchant à tout prix à rejoindre le commun des mortels (famille, boulot, tout ça, tout ça) avant de céder complètement à sa nature profonde de pistolero invincible et vengeur. Inoubliable. Juste à titre d'anecdote, histoire de bien comprendre à quel point le rôle tient une place spéciale dans le coeur de l'acteur, sachez tout de même qu'il a baptisé son propre fils Wyatt.

 "Well, Pam ... Which way you going ? Left or right ?"

 Même s'il n'a rien fait pour empêcher ça, Kurt Russell est devenu un acteur culte un peu malgré lui. THE THING ou BIG TROUBLE IN LITTLE CHINA aurait pu être des cartons au box-office mais, au lieu de ça, ils se sont d'abord plantés avant de devenir des succès de vidéo-clubs. STARGATE, ULTIME DECISION, BREAKDOWN ou encore SOLDIER, quoi que l'on en pense, dégagent tous un véritable parfum de série B. Il était inévitable qu'il rejoigne le casting d'un film de Quentin Tarantino, cinéphile acharné et grand amateur de stars en perte de vitesse et au physique buriné. Sa performance dans BOULEVARD DE LA MORT est le reflet de toute une carrière. Entre virilité exacerbée et ironie sous-jacente. Stuntman Mike alterne charisme, menace et ... une vulnérabilité hilarante.
Depuis, Kurt Russell a marqué FAST & FURIOUS 7, carton mondial, de sa présence dans un rôle spécialement écrit à sa mesure, et, surtout, il a rejoint la bande de HATEFUL EIGHT, un western (encore) de Quentin Tarantino (encore). Sa carrière ne pouvait se poursuivre sous de meilleurs auspices.

Alan Wilson

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