Blog cinéma d'utilité publique

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mercredi 22 avril 2015

CAPITAINES D'AVRIL (2000)

Titre original : Capitães de Abril.
Réalisation : Maria de Medeiros.
Scénario : Maria de Medeiros, Eve Deboise.
Directeur de la photographie : Michel Abramowicz.
Musique : Antonio Victorio d'Almeida.
Avec Stefano Accorsi, Maria de Medeiros, Joaquim de Almeida, ...
Portugal / Italie / Espagne / France - Couleurs - 123 minutes.

Des héros si discrets.


Que l'on ne si trompe pas, CAPITAINES D'AVRIL a beau être une coproduction européenne, c'est un film à 100% portugais. De par son sujet bien sûr (la Révolution des Oeillets des 24 et 25 avril 1974 qui renversa la dictature héritée de Salazar) mais aussi, et surtout, par le ton adopté. C'est là un cinéma suffisamment rare (et donc précieux) pour mériter que l'on s'attarde sur le long-métrage de l'actrice-réalisatrice Maria de Medeiros, inoubliable compagne au grand regard d'enfant innocente de Bruce Willis dans PULP FICTION, quel que soit ses défauts. Et il y en a. Malheureusement.
Pour raconter cette drôle de révolution pacifiste menée par des militaires, Maria de Medeiros a choisi de faire se dérouler en parallèle trois récits. Il y a la quête desespéré d'Antonia (Maria de Medeiros) pour faire libérer un étudiant accusé de terrorisme et torturé par la PIDE (l'équivalent portugais de la Stasi Est-Allemande), la prise de contrôle d'une station de radio de LIsbonne par Manuel, le mari d'Antonia et ancien militaire hanté par ses actes dans les colonies africaines, et, enfin, l'insurrection militaire mené par l'idéaliste capitaine Salgueiro Mala (un authentique héros local, joué par l'italien Stefano Accorsi). Disons-le tout de suite, les scènes qui concernent Maria de Medeiros actrice sont hautement dispensables. Très maladroite et sans intérêt réel, si ce n'est pour une révélation tardive assez artificielle, cette intrigue ralentit la narration et alourdit souvent le propos. Fort heureusement, elle n'occupe que la portion congrue du métrage. Et la réalisatrice de se distinguer en posant sur l'Histoire récente de son pays un regard doux-amer où l'héroÏsme et l'idéalisme cède vite la place à la désillusion et à la résignation. Une révolution, nous dit-elle, est éphémère. Et les héros aussi. Lors d'une scène proprement stupéfiante, le capitaine Mala et Manuel, tente de traverser en voiture la foule qui se masse autour d'une caserne où étaient détenus les prisonniers politiques. En raison de leur uniforme, les deux héros sont pris pour des agents de la PIDE et violemment pris à parti. Sur la plage arrière, la fille de Manuel observe, effrayée, des poings avides de vengeance s'abattre sur la carosserie et les vitres du véhicule. Ils ne devront leur salut qu'à un vieil homme qui les a reconnus. La colère, instantanément, cède la place aux applaudissements. Il en faut peu, si peu, pour que le vent tourne. Cette scène résonne comme un écho de bien d'autres scènes antérieures. Des retrouvailles chaleureuses dans un bar mais qui finissent en bagarre. La tension d'une irruption armée dans une station de radio qui se transforme en grande fête collégiale. Ou encore ce très beau moment, totalement vrai, où le capitaine Mala, encore lui, s'avance drapeau blanc à la main vers les troupes gouvernementales, certain de se faire tirer dessus, mais voit, au dernier moment, les soldats du camp adverse refuser d'ouvrir le feu et le rejoindre lui et ses régiments d'insurgés. C'est là le regard d'une femme, souvent amusée et attendrie, jamais naïve, sur ces hommes, un peu pied nickelés et héros d'un jour.
Propre sur elle et très professionnelle, la mise en scène ne s'élève néanmoins jamais plus haut que celle d'un honnête téléfilm de luxe. Le souffle nécessaire à un tel sujet manque donc un peu à l'appel. Un peu gênant mais l'intérêt de CAPITAINES D'AVRIL est ailleurs. Le film de Maria de Medeiros aborde un sujet méconnu mais fascinant, se montre très à l'aise dans des scènes intimistes à la portée aussi humaniste que politique et nous fait espérer que d'autres réalisateurs et réalisatrices s'intéressent encore à l'avenir à l'histoire du Portugal. Elle mérite d'être racontée.

Alan Wilson  
   



  


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