Blog cinéma d'utilité publique

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Obligatoire de 7 à 77 ans

samedi 27 juin 2015

HOMMAGE A CHRISTOPHER LEE (1922-2015)



Je n'ai pas découvert le talent de Christopher Lee avec les classiques de la Hammer, ni même avec sa prestation en Scaramanga, le méchant en titre de L'HOMME AU PISTOLET D'OR. Non, la première fois que son imposante silhouette m'est apparue, c'est dans un rôle mineur mais néanmoins marquant. Dans le dyptique LES ANNEES LUMIERE/LES ANNEES TERRIBLES de la Révolution Française, une fresque réalisée par Robert Enrico et Richard T. Heffron, l'immense acteur interprète Charles-Henri Sanson, bourreau glacant se tenant raide comme un piquet à côté d'une guillotine dégoulinante de sang. Son temps de présence à l'écran ne doit guère dépasser les dix minutes et il n'a presque aucun dialogue. Mais sa présence a durablement marqué l'enfant que j'étais alors. J'avais la certitude absolue d'avoir contemplé la Mort en personne. Je n'en ai retiré aucun cauchemar, mais je n'ai pas pu effacer cette icône morbide de mon esprit non plus.
Par la suite, cinéphile désordonné que je suis, j'ai abordé la carrière de ce (très) grand monsieur dans le chaos le plus total. Une MALEDICTION DES PHARAONS (1959) par là, un CHIEN DES BASKERVILLE (1958) par ci, LE CORPS ET LE FOUET (1963), mon premier Bava (ça ne s'oublie pas !) et, point d'orgue de ces années de découverte, le génial THE WICKER MAN (1973) de Robin Hardy ! Et dans son director's cut, s'il-vous-plaît ! Lee y interprète Lord Summerisle, grand ordonnateur de rites païens sur une petite île du nord de l'Ecosse.
Puis vinrent Tim Burton, Peter Jackson et George Lucas. Motivés par la même nostalgie, les cinéastes remettent alors la légende en avant. Si Burton se contente de lui offrir des seconds rôles en forme de caméos (il est un juge menacant dans SLEEPY HOLLOW ou encore le père de Willy Wonka dans CHARLIE ET LA CHOCOLATERIE), Lucas et Jackson lui offre chacun un rôle bien plus substantiel, respectivement dans les sagas STAR WARS et LE SEIGNEUR DES ANNEAUX. Si le Comte Doolu échange (élégamment) les canines du saigneur de Transylvannie contre un sabre laser, Saroumane le Blanc est un magnifique hommage au sorcier corrompu créé par J.R.R. Tolkien (que Lee connaissait personnellement) où l'acteur joue de sa voix grave et articulée comme jamais.
Je vais m'arrêter là et ne pas transformer ce billet en page wikipédia. Je vais rester dans le souvenir.
Salut l'Artiste.

Alan Wilson

JAMES BOND CONTRE LE DR NO (1962)

Titre original : Dr No.
Réalisateur : Terence Young.
Scénario : Richard Maibaum, Johanna Harwood, Berkely Mather, d'après le roman de Ian Fleming.
Directeur de la photographie : Ted Moore.
Musique : Monty Norman.
Avec Sean Connery, Ursula Andress, Joseph Wiseman, Jack Lord, Bernard Lee, ...
Royaume-Uni - Couleurs - 109 minutes.



Dans le jardin du bien et du mâle.

Alors que les héros les plus populaires du 7ème Art ne cessent de renaître, témoignant de leur vitalité (financière autant qu'artistique) au travers d'innombrables séquelles, préquelles, reboots, remakes et autres, il est toujours sain d'effectuer un retour en arrière, de remonter à la source. C'est d'autant plus vrai dans le cas de James Bond 007, l'éternel espion au service secret de Sa Majesté. Loin de la sinistrose actuel, ce premier épisode humble, solaire et dynamique est un véritable bain de jouvence ainsi qu'une belle démonstration en subversion discrète.
Sous des atours de série B élégante et dynamique, ce DR NO ne s'embarasse guère de la chevalerie des héros d'antan. James Bond n'est pas un gentleman. C'est une brute. Sophistiquée, certes, mais une brute tout de même. Et un assassin de sang froid, prêt à mener sa mission sans se soucier de la morale ou de la galanterie. Si, pour éviter de s'alliéner le grand public, le personnage est nettement adouci dans son passage du livre à l'écran, il n'en représente pas moins une fracture brutale avec les héros propres sur eux d'alors. Il est ni un anti-héros de polar noir, ni un boyscout sans peur et sans reproches. Il boit et maltraite les femmes et ça ne lui pose aucun problème de conscience. Avec un personnage de la sorte, le casting est essentiel. Et Sean Connery fut la trouvaille idéale. Une pillule poilue mais incroyablement facile à avaler. L'acteur écossais, pas encore star, fait preuve d'un charisme, d'une autorité et d'une aisance indiscutable. Aussi crédible en tueur redoutable, qu'en séducteur irrésistible ou qu'en fonctionnaire zélé de Sa Majesté. Une sacré performance.
La mise en scène de Terence Young est tout aussi admirable. Avec une apparente simplicité, et la complicité de son monteur Peter R. Hunt (futur réalisateur du mal aimé mais pourtant génial AU SERVICE SECRET DE SA MAJESTE, seule aventure bondienne de George Lazenby), Young impose un style proche de la bande-dessinée filmée. Les cadrages iconiques et soignés se succèdent à une belle allure et les scènes d'actions sont soudaines et sèches. Les couleurs vives des costumes, des décors et des éclairages font baigner le film dans un sentiment de surréalisme pop agréable et, surtout, jamais ostentatoire. Une belle leçon d'équilibrisme et de formalisme.
Encore éloignée des gros budgets à venir, ce premier épisode évite d'en faire les caisses misant beaucoup sur une intrigue simple mais efficace. Terence Young ne charge pas la mule et fonce vers la ligne d'arrivée sans négliger de mettre en valeur son casting et ses décors naturels (la Jamaïque).  Revoir JAMES BOND CONTRE DR NO aujourd'hui, c'est un peu assister à la naissance du blockbuster moderne. Sans le cynisme et les caches-misères à cent million de dollars.

Alan Wilson.   

jeudi 11 juin 2015

RESIDENT EVIL (2002) / RESIDENT EVIL - APOCALYPSE (2004) / RESIDENT EVIL - EXTINCTION (2007) / RESIDENT EVIL - AFTERLIFE (2010) / RESIDENT EVIL - RETRIBUTION (2012)

Réalisateurs : Paul W.S. Anderson, Alexander Witt, Russell Mulcahy.
Scénarios : Paul W.S. Anderson, d'après RESIDENT EVIL, un jeu créé par Shinji Mikami et développé par Capcom.
Directeurs de la photographie : David Johnson, Derek Rodgers, Christian Sebaldt, Glen McPherson.
Musique : Marco Beltrami, Marilyn Manson, Jeff Danna, Charlie Clouser, Tomandandy.
Avec Milla Jovovich, Michelle Rodriguez, Oded Fehr, Ali Larter, Sienna Guillory, ...

Canada/Royaume-Uni/Allemagne/France/Etats-Unis - Couleurs -  100 minutes/94 minutes/94 minutes/97 minutes/96 minutes.  



Série Z.

Amusant tout de même de voir à quel point une franchise cinématographique peut se développer en dépit du bon sens, niant avec un aplomb consternant quasiment toutes les qualités du matériau dont il est issu. AInsi, RESIDENT EVIL, le jeu, et RESIDENT EVIL, les films sont impossibles à comparer. Leurs seuls points communs ? Des noms, des bouts d'histoire, quelques monstres. Et ça s'arrête là. De toute façon, ça n'est pas plus mal. On ne peut pas juger un film comme on juge un jeu vidéo.  
A la tête des cinq (et bientôt six) RESIDENT EVIL, un trio de créatifs. Le producteur Samuel Hadida, le scénariste (!) et réalisateur Paul W.S. Anderson et sa femme, l'actrice (!!) Milla Jovovich. Si le premier se contente de signer et d'encaisser les chèques (incroyable mais vrai, la franchise engrange des millions), les deux autres chapeautent avec une belle incompétence. Artisan consciencieux et généreux mais parasité par des réflexes de fanboys, Paul W.S. Anderson possède une filmographie qui oscille entre agréables distractions (SOLDIER, MORTAL KOMBAT) et nanars de compétition (les RESIDENT EVIL donc, mais aussi le premier ALIEN VS PREDATOR et ses TROIS MOUSQUETAIRES) avec, au milieu, une incartade réjouissante, le jouissivement déviant EVENT HORIZON. Quant à sa muse, Milla Jovovich, anciennement Leloo à la tignasse orangée qui pique les yeux et Jeanne d'Arc illuminée chez notre bon gros nounours national Luc Besson, elle explore l'étendue de son absence de talent en incarnant Alice, héroïne horripilante à la psycholoie alambiquée embarquée de films en films dans un monde pas vraiment merveilleux. 
Un temps promis à George A. Romero, le pape des morts-vivants, le premier volet de la saga RESIDENT EVIL échoue finalement entre les mains d'Anderson qui se charge éalement d'en écrire le scénario. Composant avec un budget plutôt maigre de 35 millions de dollars et l'obligation de livrer un produit tous publics (une hérésie pour un survival horror à base de mutants cannibales), le cinéaste parvient à faire illusion pendant environ quinze minutes. Juste le temps de décimer avec une certaine cruauté tout le personnel d'un gigantesque laboratoire souterrain contrôlé par une intelligence artificielle aux pulsions homicides et d'illustrer le réveil de son héroïne, nue et amnésique, au son du score angoissant de Marco Beltrami et Marilyn Manson. Puis, patatras, voilà que déboule le commando le plus débile et incompétent de l'histoire et c'est parti pour une bonne heure de film de couloir cheap, mal joué et laborieux dans son déroulement. Le tout servi par une interprétation unanimement calamiteuse. Reste le prologue, un sursaut inattendu annonçant une séquelle apocalyptique au détour d'un travelling arrière vertigineux révélant une cité en flammes, ravagées par des hordes de zombies. Maigre consolation.
Occupé à (mal) torcher ALIEN VS PREDATOR, Paul W.S. Anderson ne rempile pas à la réalisation de RESIDENT EVIL - APOCALYPSE dont il se contente d'écrire le scénario. A la barre, le débutant Alexander Witt, ancien réalisateur de seconde équipe ayant appris le métier dans l'ombre de Jan de Bont. Un cv de technicien bien fourni qui a convaincu la production de le laisser voler de ses propres ailes. Mal leur en a pris. Avec un budget sensiblement supérieur au premier volet, APOCALYPSE se paie des allures de série Z ridicule. Voire franchement drôle dans son incapacité à offrir ne serait-ce qu'une seule séquence correctement emballée. Et que dire du grand méchant du film, le "terrible" Nemesis. Croisement caoutchouteux et neuneu entre Casimir et un cénobite d'HELLRAISER sous stéroïdes, ses apparitions régulières, entre beuglements gutturaux et pyrotechnie destinée à noyer le poisson, provoquent une franche hilarité. Et comme si ça ne suffisait pas, le tout se termine par un épilogue singulièrement tartignole durant lequel notre Alice se découvre des super pouvoirs. La logique aurait voulu que l'on arrête là les frais. Mais non, les billets verts tombant encore plus nombreux, le couvert est remis pour un troisième volet.
Sous la houlette du vétéran Russell Mulcahy (RAZORBACK et HIGHLANDER, et ... oublions gentiment le reste), la qualité remonte d'un cran. Du Z on passe au B, et du film de zombie on dérive vers le post-apo à la sauce Mad Max dans le désert du Nevada. Le rythme est soutenu, la mise en scène est soignée et l'interprétation est enfin correcte. L'intrigue, moins éparpillée qu'auparavant, s'articule autour d'un laboratoire souterrain (encore !) tenu par un savant fou à la solde d'une corporation maléfique et des survivants de la surface, regroupés autour d'une Milla Jovovich qui se prend pour Mel Gibson. S'il ne transforme pas le plomb en or (le scénario, signé de vous savez qui, est tout aussi merdique qu'avant), Mulcahy emballe néanmoins un film plaisant à suivre. Presque inespéré au regard de ce qui a précèdé. En mettant son héroïne à la tête d'une armée de clones d'elle-même, le final ouvre d'ailleurs des perspectives excitantes pour la suite.       
La suite, elle se nomme AFTERLIFE et RETRIBUTIONS. Les deux bouses, tournées en 3D et en Imax (mais en fait, on s'en fout), voient le retour d'Anderson derrière la caméra. Incapable de construire une mythologie qui se tienne un tant soi peu debout (par exemple, la centaine de clones du troisième opus se limite bizarrement à une poignée durant l'ouverture du quatrième et les pouvoirs d'Alice disparaissent puis réapparaissent sans que cela se justifie réellement), le cinéaste accumule les effets de style ringards (bullet time façon Matrix du pauvre à tous les étages), le fan service idiot et les clins d'oeils stériles aux précédents volets avec force résurrection de protagonistes que l'on croyait envoyés ad patres. La mise en scène est horriblement télévisuelle (dans le meilleur cas), le scénario abscons et l'interprétation bat encore des records de nullité. Irregardable.
Un sixième et dernier (vraiment ?) volet est en cours de préparation. Sincèrement, je suis pas pressé. Fin de transmission.

Alan Wilson 

lundi 1 juin 2015

MAD MAX - FURY ROAD (2015)

Réalisation : George Miller.
Scénario : George Miller, Brendan McCarthy, Nico Lathouris.
Directeur de la photographie : John Seale.
Musique : Junkie XL.
Avec Tom Hardy, Charlize Theron, Nicholas Hoult, Hugh Keays-Byrne, Rosie Huntington-Whiteley, ...
Etats-Unis - Couleurs - 120 minutes.




Mille bornes.

"Le film du siècle !"
"Une bombe !"
"Excitant, surprenant, hors-norme !" 
(j'en passe et des meilleurs ...)
A moins de vivre dans une caverne, totalement coupé de notre civilisation (sur)connectée, il aura été difficile, si ce n'est impossible, d'échapper au torrent de critiques superlatives concernant ce quatrième volet de la saga Mad Max. Lire, entendre et prendre pour argent comptant ces vibrations dithyrambiques juste avant de se précipiter dans la salle de cinéma la plus proche pour apprécier la bête est donc à double tranchant. Soit on ressort déçu en jurant de ne plus jamais se faire avoir, soit on rejoint le cortège des adeptes. Désolé, mais je déteste payer une place de cinoche pour ressortir en tirant la gueule (tout augmente de nos jours, même le prix de la déception) et je ne suis pas un mouton. J'ai préféré attendre, loin de la ferveur, histoire de me faire une idée toute personnelle.  Et sans trop m'avancer, je crois que j'ai eu raison.
Assez tergiversé, plongeons dans le vif du sujet. MAD MAX FURY ROAD, dixième long-métrage du cinéaste australien George Miller et séquelle tardive n'est pas le film du siècle, ni même un chef d’œuvre. Ce n'est pas non plus un film pro-féministe ou écolo. C'est juste un excellent blockbuster mis en scène avec une maîtrise telle qu'il ridiculise la quasi-totalité des films d'action à grand spectacle sortis depuis une dizaine d'années, tous budgets et nationalités confondues. Marvel Studios ? Michael Bay ? Chris Nolan ? les Fast & Furious ? Allez, ouste ! Renvoyés aux bancs de l'école ! Rythme, découpage, lisibilité, ampleur, MAD MAX FURY ROAD n'a de leçons à recevoir de (presque) personne en la matière. D'où l'impression bénie de revenir à une époque où l'on pouvait en prendre plein les yeux sans finir aveugle. C'est donc énorme, inespéré et foutrement réjouissant. Mais ... c'est tout. 
George Miller ne s'en est jamais caché. MAD MAX FURY ROAD a été conçu comme une longue course-poursuite de deux heures et rien d'autre. Un véritable exercice de style. Le storyboard a même précédé (remplacé ?) l'écriture d'un scénario. Une série d'images puissantes, un collage virtuose, en lieu et place d'une histoire à proprement parler. Efficace, oui. Mais également limité. L'action, formidablement généreuse et inventive, introduit un bon paquet de personnages qu'elle ne développe pas, ou si peu. Un seul adjectif suffit généralement à les caractériser. Max est un survivant, Furiosa a la haine, Immortan Joe est un dictateur, les Épouses sont belles, douces et rebelles à la fois. Et ainsi de suite. Du coup, les interactions entre les personnages en souffrent et on se demande souvent pourquoi un tel en déteste un autre, pourquoi un tel se joint à un autre. La victime la plus évidente de cette sur-simplification dramatique est évidemment Max. Personnage sur le fil du rasoir, partagé entre des instincts de bête sauvage et les restes d'une humanité et d'un sens de la justice piétinés par la violence et le chagrin, Max Rockatansky s’accommode bien mal de ces raccourcis. Si Tom Hardy ne parvient jamais à faire oublier Mel Gibson, ce n'est pas vraiment de sa faute. L'acteur est bon, très bon même. Mais comment arriver à imposer sa réinterprétation d'un personnage mythique avec si peu à jouer ? La grande gagnante de l'histoire, comme tout le monde le sait déjà, c'est Charlize Theron, charismatique comme rarement. Elle compose un superbe portrait de guerrière en quête de rédemption. Oh, et puisque l'on cause du casting, une petite injustice se doit d'être réparée. Nicholas Hoult, alias Nux, le warboy, kamikaze mourant rêvant d'un walhalla chromé, est la vraie révélation du film. Entre fragilité, folie, courage et remords, sa prestation est la plus complexe du métrage. Un bel exploit si peu mentionné, c'est un peu triste, non ?
MAD MAX FURY ROAD ne raconte pas grand-chose. Histoire d'un aller et retour. Alliances et confrontations. La folie comme seul horizon. Un minimalisme punk à l'impact immédiat et qui affole les sens et la rétine. Le cerveau reptilien est comblé au-delà de toutes espérances, avec l'art et la manière. Le coeur bat à cent à l'heure. L'âme, elle, crie un peu famine.